Ils sont descendus de leur montagne. Le temps d’une manifestation sur le parvis de la gare de Grenoble, battue par la pluie et le vent froid de ce lundi 6 novembre. Banderole jaune et capuches détrempées, une cinquantaine d’usagers de la ligne TER Grenoble-Gap interpellent les passants à coups de chants satiriques. Objectif : remettre de symboliques lettres de candidature pour le poste de chef de gare de Lus-la-Croix-Haute (Drôme) à la SNCF – qui veut le supprimer – et à la région Auvergne-Rhône-Alpes. Et bien sûr, attirer l’attention de son président Laurent Wauquiez, défenseur autoproclamé de la ruralité et des petites lignes. « Lolo ! Lolo ! », scandent-ils, avant d’ironiser sur l’omniprésence médiatique du candidat à la présidence des Républicains. « Avec vos impôts, préférez-vous payer les frais de campagne de notre président ou la rénovation de la ligne TER ? », fait mine de s’interroger Lionel Perrin, l’un des organisateurs de la manifestation. Copieuses huées garanties.
Quelques heures plus tôt, ils sont partis de la gare de Clelles, au cœur du Trièves. Pour ces villages disséminés sur les contreforts du Vercors, le lien à l’agglomération grenobloise ne tient qu’à quelques kilomètres de rails, souvent en piteux état. Ce jour-là, le train arrive avec une heure de retard. Un symptôme du sous-investissement chronique dont souffre cette ligne pourtant stratégique qui rejoint le nœud ferroviaire de Veynes, plus au sud dans les Hautes-Alpes. De là, le TER permet de gagner Briançon, Valence, Grenoble ou encore Marseille. Mais plus pour longtemps. Car la SNCF souhaite supprimer d’ici mars 2018 les deux postes et demi d’agent de circulation de la gare de Lus-la-Croix-Haute, entre Grenoble et Veynes. Ces postes assurent notamment le croisement des trains sur cette ligne montagneuse difficile. À terme, l’absence de personnel dans la gare risque d’occasionner des retards supplémentaires et de décourager les usagers d’emprunter le train, justifiant sa fermeture… « C’est une manière de dépouiller la ligne petit à petit », dénonce Bertille Darragon, une manifestante.
Il paraît qu’ils font des économies, que la ligne n’est pas rentable. Mais est-ce qu’un service public doit être rentable ?
En ce milieu de journée, le calme règne chez la quinzaine de passagers de l’unique wagon. « Mais à l’heure de pointe le matin, on a deux ou trois rames blindées », assure Alexandra, contrôleuse à la SNCF depuis sept ans. Jusqu’à mille voyageurs par jour, revendique le collectif. Des lycéens scolarisés à Grenoble, des travailleurs et, le week-end, les militaires de la base de Gap en permission.