Après huit ans d’absence, Robyn retrouve la paix intérieure avec « Honey »

Robyn, prêtresse rebelle de la pop, revient avec “Honey”, un 6e album résilient
C : On l’oublie souvent, mais la pop n’est pas née qu’aux États-Unis ou au Royaume-Uni, elle a aussi de profondes attaches en Suède. L’une d’elles est Robyn, vue comme un modèle par Britney Spears ou bien Rihanna. La chanteuse, qui fêtera ses 40 ans en 2019, a sorti, le 26 octobre, Honey, son 6e album studio. Morgane Giuliani l’a écouté pour nous, et va nous rappeler, au passage, pourquoi la musique de Robyn est toujours incontournable. Bonjour Morgane !
M : Bonjour Corentin ! Tu l’as bien dit, Robyn, c’est juste l’une des plus grandes icônes de la pop contemporaine. Robin Miriam Carlsson, de son vrai nom, est repérée à l’âge de 13 ans par le groupe Legacy of Sound. 3 ans plus tard, elle commence sa carrière, et l’un de ses premiers tubes est Show Me Love, présent sur l’album Robyn Is Here, sorti en 1998 :
EXTRAIT 1
Show Me Love
C : On les sent bien, la fin des années 90… Très vite, la jeune chanteuse se retrouve à travailler avec Max Martin, petit producteur suédois, lui aussi…
M : Max Martin deviendra le plus gros producteur de la pop du 21e siècle, tout simplement. Il est à l’origine de nombreux tubes de Britney Spears, Katy Perry ou Taylor Swift, pour ne citer qu’elles. Il l’a redit récemment à Robyn, toutes les chanteuses réclament un son “à la Robyn”. Un super papier du Guardian retraçant la carrière de la Suédoise, écrit par la non moins géniale Laura Snapes, cite un extrait du livre The Song Machine. On y apprend que le label Jive, aux États-Unis, a signé Britney Spears en espérant créer, je cite, “la Robyn américaine avec un côté girl next door en plus”. La légende veut d’ailleurs que Robyn ait refusé de chanter … Baby One More Time, écrite par Max Martin, qui l’aurait ensuite proposée à Britney Spears. Ce que Robyn a depuis démenti, mais la légende est tenace.
C : Avant Britney, il y a donc eu Robyn. Ses deux albums suivants, My Truth et Don’t Stop The Music, ne sortent pas aux États-Unis. Le premier, parce qu’elle refuse de retirer deux chansons parlant d’avortement.
M : Une vraie rebelle qui refuse l’image préfabriquée d’une popstar sans consistance. Toute la carrière de Robyn a été, et est toujours, un long processus de réappropriation de son travail et de son rapport à la musique. C’est à partir de 2005 et sa rencontre avec le punk suédois Klas Åhlund qu’elle trouve son style : des chansons dance pop en béton, avec des synthés syncopés, où les histoires d’amour finissent extrêmement mal. Robyn est l’une des premières à parler de l’impossibilité de s’en remettre, au point de stalker son ex. Comme l’énorme tube With Every Heartbeat, extrait de l’album Robyn, qui lui vaut une nomination aux Grammy Awards :
EXTRAIT 2
With Every Heartbeat
M : Des beats aussi violents qu’un coeur en souffrance, des synthés rasants et un souffle coupé sur un refrain simple disant : “Ça fait mal à chaque battement de coeur”. Robyn parvient à magnifier les déceptions amoureuses, sacerdoces de la pop music, dans des titres transcendantaux aux pouvoirs magiques. Trois ans plus tard, c’est avec un autre hit, cette fois, Dancing On My Own, que la Suédoise réalise l’impensable : réconcilier la pop et la scène indé.
EXTRAIT 3
Dancing on my own
C : Ce titre est diffusé dans un épisode de la première saison de la série Girl, très prisée des hipsters urbains du début des années 2010.
M : Dancing On My Own devient l’hymne des millenials paumés en amour, hétéros ou homos, qui continuent à danser malgré les plaies au coeur. Cette chanson devient aussi un modèle pop à suivre. On retrouve son influence dans We Found Love de Rihanna et Calvin Harris ou Run Away With Me de Carly Rae Jepsen, par exemple. Dancing On My Own est présent sur l’album Body Talk Pt. 1, sorti en 2010. Il aura donc fallu attendre 8 ans pour que Robyn sorte Honey, son 6e disque studio, disponible sur Konichiwa, son propre label. La Swedish mother of pop y réitère ses merveilles avec plusieurs titres forts, dont Missing U, un scintillant single de retour.
EXTRAIT 4
“Missing U”
C : Pourquoi avoir été absente si longtemps ?
M : Une rupture après une très longue relation, le décès de son collaborateur de longue date Christian Falk, et l’épuisement de 20 ans de carrière la poussent à ralentir, face à une dépression qui la paralyse pendant deux ans. Entre Londres, Paris, Los Angeles et Ibiza, Robyn prend du temps pour elle, démarre une psychothérapie. Elle renoue avec ce même partenaire de longue date, le vidéaste Max Vitali. La chanteuse tisse des liens avec le songwriter britannique Kindness, et Joseph Mount, chanteur de Metronomy.
C : C’est avec eux, et l’indéboulonnable Klas Åhlund, qu’elle façonne Honey.
M : Et qu’il est doux, ce nouveau disque. Entre les éclats pop se nichent des morceaux low-tempo, plus expérimentaux qu’à l’accoutumée. Ici, le miel est une métaphore pour désigner sa reconstruction, son retour à une paix intérieure lumineuse, titre après titre.
EXTRAIT 5
“Honey”
M : La chanteuse a voulu abandonner la construction de morceaux en début-milieu-fin, et s’est plus investie dans la production. Entre pop, électro minimaliste, disco, et house, ces 9 morceaux sont un voyage nocturne dans le coeur toujours battant de Robyn. Mention spéciale à l’enivrante Baby Forgive Me, qui m’a foutu les poils, comme on dit. Dans la dernière track, Ever Again, Robyn le promet, sur une basse langoureuse : “Plus jamais, non, plus jamais, on ne me brisera le coeur”.
C : Honey, le 6e album de Robyn, est disponible chez Konichiwa/Interscope, et sur toutes les plateformes de streaming. Aucun concert n’est encore annoncé en France, mais on ne désespère pas ! Merci beaucoup Morgane Giuliani et à très vite !