Jean-Luc Mélenchon se serait-il mis les antifas dans la poche ? Mis à part quelques purs et durs qui resteront à la maison pour ne pas participer, jamais, à la mascarade que sont selon eux les élections, les antifas semblent vouloir aller voter cette année. Du moins, ceux que Les Jours ont interrogés. Et ceux-là nous ont aussi confié miser sur Mélenchon. Certains adhèrent pleinement au programme des Insoumis. Pour les autres, modérément séduits par l’idée d’un Mélenchon à l’Élysée, il reste la solution du moins pire. Tout d’abord parce qu’il est le seul candidat capable de prendre la place de l’extrême droite au second tour. Ensuite parce qu’avec Mélenchon comme président, l’antifascisme se trouverait probablement dans une meilleure posture qu’aujourd’hui.
Le vote antifa, à la base, ça n’existe pas vraiment. « L’antifascisme n’est pas une réalité unifiée », explique aux Jours le sociologue Ugo Palheta, qui poursuit : « Pendant l’entre-deux-guerres, les antifascistes votaient selon leur appartenance partisane, communiste ou socialiste pour l’essentiel, ou ne votaient pas, dans le cas de l’antifascisme anarchiste. » Aujourd’hui, beaucoup de groupes antifascistes français se revendiquent de la mouvance autonome : ils agissent en dehors des partis et des syndicats. Dans le cadre des élections, ils sont volontiers abstentionnistes. C’est le cas de l’AFA Paris-Banlieue, dont Mélissa fait partie. L’étudiante développe : « Mon groupe ne voit pas les élections comme un tournant de la vie politique. C’est plutôt un moment de paralysie pour nos luttes sociales. » L’AFA Paris-Banlieue ne fait donc la campagne d’aucun candidat. Pas plus qu’elle n’indique à ses militants le comportement électoral à suivre. Les groupes antifas défendent avant tout une participation politique de rue. Dimanche 3 avril, ils ont ainsi appelé à rejoindre une manifestation contre l’extrême droite à Paris.
Avec l’affaiblissement de la gauche dans son ensemble et le fait que l’extrême droite soit créditée à plus de 30 %, le vote antifasciste se déplace du second au premier tour.
Mais cette année, les antifas semblent poussés dans les bureaux de vote par un contexte politique anxiogène. Marco est membre de l’AFA Paris-Banlieue depuis 2017, année d’élection présidentielle lors de laquelle, se souvient-il, beaucoup de camarades n’avaient pas voté. « 2022, c’est différent, considère-t-il. On est pris par cette urgence, celle de la situation climatique, de la radicalisation du macronisme et de la montée du racisme. » Selon Ugo Palheta, la place de l’extrême droite dans les sondages motive le vote et en particulier le vote utile.