Dimanche, ils marchaient en tête des manifs du 1er mai, détachés des partis de gauche et de leur union en cours (lire l’épisode 3 de la série Troisième tour, « C’est la Nupes finaaaleu… »). Pendant l’entre-deux-tours, ils n’ont pas donné de consigne de vote et se sont plutôt rangés derrière le « ni Macron, ni Le Pen » des blocus étudiants et lycéens : ce sont les antifas autonomes. L’antifascisme n’entretient pas un rapport figé aux institutions. Dans les années 1930, la tendance était plutôt au soutien des forces de gauche, pour un front populaire et contre le fascisme, ce qui est aujourd’hui la stratégie de la Jeune garde, rencontrée à Lyon dans l’épisode 2. Néanmoins en France, c’est plutôt l’antifascisme autonome qui domine la dernière décennie. Parce qu’ils considèrent que la droite comme la gauche cautionnent voire entraînent une « fascisation » de la société, les autonomes agissent loin des institutions et contournent, parfois, le cadre légal. Camille a 35 ans, il est sapeur-pompier professionnel et membre fondateur de la Gale, un groupe antifa autonome dissous en mars dernier [cette dissolution a été annulée par le Conseil d’État en mai 2022]. Selon lui, la lutte ne doit pas se borner à celle contre l’extrême droite : « Elle n’est que la partie visible de l’iceberg. »
L’autonomie est avant tout un courant politique radical qui prône l’action directe et en dehors des structures officielles. Apparue au cœur des crises sociales européennes des années 1960, l’autonomie traverse différentes causes, de l’anticapitalisme à la lutte climatique. Plusieurs groupes s’en revendiquent, chez les antifas. En France, c’est le cas des AFA (Actions antifascistes) ou de la Gale lyonnaise, qui se forment au début des années 2010 dans le contexte d’une recrudescence des violences d’extrême droite, à leur paroxysme avec la mort de Clément Méric en 2013. Dans les mobilisations contre la loi travail de 2016, le courant autonome se rassemble et se concrétise quand des manifestants sans encartage politique décident de marcher face aux forces de l’ordre, à l’avant des partis et des syndicats. Ils forment alors le cortège de tête