À première vue, Laurent fait plutôt gros bras, limite bourrin. Mais le « baqueux », passé par l’armée avant d’entrer dans la police, se veut très rigoureux sur la sécurité des armes à feu. « Je supporte pas les trous du cul qui jouent avec leur pétard », s’emporte le flic au parler fleuri. « Dès que je vois un couillon qui fait le con avec son arme, je lui dis : “Une arme, on joue pas avec.” Si tu la touches pas, elle fait rien. » Laurent garde en mémoire l’accident mortel « inadmissible » qui a eu lieu au commissariat de Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis, en mars 2018. Alice V., une policière de 25 ans, a été tuée par l’un de ses collègues, désormais révoqué et poursuivi pour homicide involontaire. Plusieurs de ses camarades ont rapporté qu’il s’amusait parfois à les braquer avec son flingue, pour rire. Xavier, en poste dans un service financier, trouve ça « hallucinant ». « Chez nous, on n’hésiterait pas à faire un rapport », tranche-t-il. Si le policier, fort de quelques années d’expérience, met cette coupable légèreté sur le compte de « la jeunesse », il reconnaît aussi que l’ancienneté peut conduire à penser, à tort, « qu’il n’y a aucun risque ». Il lui est déjà arrivé de mettre en service son arme dans une voiture ou dans son bureau, en orientant le canon « vers le gilet pare-balles » au cas où un coup partirait. Il sait pourtant qu’il y a des puits pour ça. Fabien, brigadier de PJ, attribue d’ailleurs la plupart des accidents aux « raccourcis » pris par les fonctionnaires. Comme s’épargner une vérification de sécurité pour gagner un peu de temps.
Tant que le nombre de tirs accidentels ne sera pas zéro, ça me semblera énorme.
Les Jours vous racontaient précédemment (lire l’épisode 7, « Erreur fatale au stand de tir ») un fait divers policier qui a eu lieu à Beauvais, dans l’Oise, en 2016. Pendant un entraînement au tir, une policière de 58 ans avait accidentellement tué l’un de ses collègues d’une balle dans la tête. Si ce genre d’accident n’est heureusement pas monnaie courante, l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) s’est déjà inquiétée d’un certain relâchement, dans un contexte où les policiers font davantage usage de leur arme de service (lire l’épisode 1, « La position du tireur »).

Dans une note de juillet 2017, la « police des polices » constate une augmentation notable du nombre de tirs accidentels avec l’arme de service : 23 au premier semestre 2017, contre 10 au premier semestre 2016. Le signe