2008. Une psychiatre et psychanalyste, directrice de recherche à l’Inserm, annonce une découverte importante. L’inconscient de la mère peut déclencher une naissance, voire la conception d’un bébé, afin de caler les échéances sur des dates « commémorative d’un autre événement du passé ». Exemple cité par l’auteure, Monique Bydlowski, dans Le Carnet psy : « Une femme a mis au monde un enfant mort-né un 3 septembre. Déprimée, elle décide d’en rester là et pratique une contraception par stérilet, efficace pendant cinq ans. Cinq années plus tard, elle a la surprise d’être enceinte malgré son stérilet et le calcul de son terme montre qu’elle va accoucher un 3 septembre, cinq ans plus tard, jour pour jour. » Étonnant, pour ne pas dire incroyable.
Le chercheur et psychologue du développement Nicolas Gauvrit n’y croit pas. La croyance, d’une manière générale, n’est pas son registre. Psychologue du développement et mathématicien, il voudrait des preuves. Or, Monique Bydlowski n’en a jamais apporté. « Elle cite de nombreux cas, relève-t-il, mais cela ne veut rien dire. Nous pouvons tous trouver, dans notre vie, des dizaines de dates signifiantes. » L’anniversaire de la mère, celui du père, celui des grands-parents, les naissances et les morts des arrières-grands-parents, des amis, des cousins, plus les accidents de la vie, etc. « Si on donne une marge d’erreur de plus ou moins 24 heures à l’inconscient, s’amuse Nicolas Gauvrit, tous les jours de l’année feront rapidement l’affaire. On ne peut pas affirmer que l’hypothèse de Monique Bydlowski est fausse, mais elle n’est pas démontrée. »

Pas davantage, d’ailleurs, que la quasi-totalité de la grille de lecture psychanalytique des rapports mère-enfant : la sexualité est le pivot du développement, tous les petits garçons désirent leur mère et veulent tuer leur père inconsciemment, les enfant passent durant leurs premières années par des phases bien identifiées, qui conditionneront leur existence tout entière (les radins sont réputés avoir eu un apprentissage mal vécu de la propreté, par exemple)… Sigmund Freud (1856-1939) a noirci des centaines de pages sur le rôle crucial de la petite enfance. Il la voyait comme la phase-clé du développement de la personnalité, mais aussi comme la source initiale de tous les problèmes psychologiques, voire psychiatriques. Son épigone Bruno Bettelheim (1903-1990) a ainsi soutenu pendant des années que les mères trop distantes étaient la cause de l’autisme chez les enfants.