Un jour, elle a laissé le hamster de son fils traîner dans le salon quand votre fille était là. Elle doit être méchante : parfois, le petit pleure quand on le laisse chez elle. Elle le gronde, il vous l’a dit. Pas clairement, mais vous avez compris. Quand vous lui avez demandé de toujours expliquer les interdits, elle a soupiré. Quand vous avez donné consigne de ne jamais dire non, elle a rigolé. Quand vous arrivez un quart d’heure en retard, elle n’est pas contente et elle le montre. À la fin, elle a déménagé, vous plantant sans préavis.
Désinvolte ou trop rigide, incompétente ou donneuse de leçons, la nounou alimente les conversations des parents. Ces derniers se doutent-ils que la réciproque est tout aussi vraie ? Interrogées sur ce qu’elles trouvent le plus difficile dans le métier d’assistante maternelle, qu’elles ont exercé de longues années, Pascale Legrand-Lafoy et Annie Lucas répondent d’une seule voix : « Les parents. » « Un jour, raconte la première, une mère qui avait des jumeaux et qui était venue prendre contact parce qu’elle cherchait une nounou me demande en fin de discussion, l’air de rien : “Et vous me feriez un prix, pour les deux ?” »
Annie Lucas, de son côté, se souvient avec émotion de cette mère qui lui a demandé si elle ne pouvait pas lui repasser son linge pendant la sieste du petit, pour le même prix. Ou encore de ce père, dont la femme était à la maternité pour le deuxième, qui l’a sollicitée pour garder l’aîné le 25 décembre, parce qu’il avait envie de souffler un peu. Sans oublier le problème récurrent, la source de tension numéro un : les horaires. « Il y a un contrat. Nous devons les garder de 8 heures à 18 heures, pas 18 h 30, explique Pascale Legrand-Lafoy. Même les plus gentils des parents ont toujours du mal à intégrer que notre vie privée est gelée toute la journée. Nous devons aussi nous occuper de nous. Quand vous avez pris rendez-vous chez le médecin, que vous devez partir et que les parents sont en retard, c’est pénible. Vous pouvez les prévenir le matin, bien sûr, mais ça aussi, c’est pesant. »

Un cas de figure particulièrement compliqué, selon Annie Lucas et Pascale Legrand-Lafoy, est celui des parents hyper-investis dans l’éducation de leur enfant et pétris de principes. Les deux assistantes jugent les tout-petits d’aujourd’hui nettement plus éveillés que ceux d’il y a une quinzaine d’années. Ils sont davantage stimulés, entourés de la sollicitude de leurs deux parents.