Au début, je ne fais pas le fier. Si j’osais, je dirais qu’Harry et moi on se sent tout petits. On est là, tous les deux dans les jardins de Frogmore et on attend Willy et Papa. D’ailleurs, je tiens à dire que je ne cautionne pas l’usage erratique des majuscules fait par Harry, mais bon, ce n’est pas comme si j’avais voix au chapitre dans ce livre – après tout, je n’en suis que le héros. Alors donc on est là, Harry et moi, on est de retour au Royaume-Uni pour la première fois depuis 2020 qu’on a foutu le camp avec Meghan (lire l’épisode 9, « Dégelée royale pour Harry et Meghan ») pour une triste occasion : Grand-Père (je vous avais prévenus pour les majuscules) a cassé sa pipe (lire l’épisode 13, « Tears for Phil »). Et pendant qu’on attend, Harry en profite pour faire de la poésie paysagère : « Je me suis tourné dos au vent et j’ai aperçu du coin de l’œil la ruine gothique dressée derrière moi, qui n’était pas plus gothique en réalité que le London Eye – l’œuvre d’un architecte malin ; une mise en scène. Comme tant de choses ici, ai-je songé. » Bon, Harry n’est pas ici le seul coupable de cette envolée lyrico-métaphorique puisque qu’un ghostwriter, J. R. Moehringer, lui a prêté sa plume (enfin, vendu contre un million de livres, paraît-il). Mais bref, attendant son daron et son frère, Harry laisse voguer ses pensées vers sa mère, bien sûr, Diana, « Maman ». Il la compare – enfin J. R. Moehringer, hein – à Earendel, l’étoile la plus lointaine et la plus ancienne, mais qui, écrit-il, « demeure visible à nos yeux de mortels en raison de son éclat phénoménal, étourdissant. Voilà ce qu’était [s]a mère. » Sur ce, Charles et William arrivent, ils s’engueulent tous les trois, les uns disant ne pas comprendre pourquoi l’autre – Harry, et moi aussi par la force des choses – est parti. Ça lui a donné « un coup de fouet », écrit-il. « Je me suis dit : il faut que je leur explique […]. Alors voilà : Papa ? Willy ? Tout le monde ? Je vais vous expliquer. » Et boum, Spare, Le Suppléant (Fayard, 2023) en VF, était né. Le livre, que dis-je, la bombe dont tout le monde parle depuis sa sortie mondiale ce mardi et qui me met, moi, à la une de toute la presse, sans jamais me donner la parole – et je remercie Les Jours de me permettre de le faire en exclusivité planétaire. Oui, moi, le vrai héros, le fil rouge, l’omniprésent au long des 541 pages, moi HRZ, alias le royal zizi d’Harry.
Oui, vous avez bien lu : la bio d’Harry par son zizi. Le parc d’abonnés des Jours dût-il souffrir d’une brutale vasoconstriction face à telle méthode, l’honnêteté journalistique et la rigueur professionnelles nous y contraignent et nous n’hésiterons pas à dire la vérité, quitte à gêner : l’autobiographie d’Henry de Sussex est avant tout une génitobiographie. Ne niez pas, ne refusez pas l’évidence, vous ne les avez pas lues, les 541 pages du livre, nous si, et le braquemart princier les traverse de bout en bout. Et non, nous ne céderons pas à la facilité grivoise de voir dans les titres des trois parties qui composent la biographie d’Harry une analogie avec son pénis. « Dans les ténèbres qui m’enserrent », « Debout bien que blessé » et « Capitaine de mon âme » sont en fait des extraits – même si son auteur se garde de le dire – d’Invictus, le poème de William Ernest Henley qui a inspiré à Harry la création des Jeux Invictus qui voient s’affronter des vétérans de guerre handicapés. Si le chapitre « Debout bien que blessé » raconte en large et en travers la carrière militaire d’Harry, il accueille surtout l’épisode certainement le plus marquant de sa bio et celui qui a inspiré aux Jours ce brillant article : la bite gelée – mais laissons-la raconter elle-même cette traumatisante aventure.