Voilà. Nous y sommes. Le bébé est là. Il est né ce lundi 6 mai. Il s’appelle… « rapport de l’IPBES », la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques, sous l’égide de l’ONU. Il pèse 1 500 pages. Concocté ces trois dernières années par 145 scientifiques venus de 50 pays, il dresse un tableau de la biodiversité mondiale plus sombre que le « noir profond » cher aux imprimeurs. Ce n’est ni un scoop, ni une révolution, c’était même prévu (lire l’épisode 64, « Biodiversité : le pavé de mai »). Et pourtant, quelque chose n’en finit pas de surprendre dans cette absence de surprise, quelque chose résiste, quelque chose cloche. Mais quoi ?
Ce n’est pas le document lui-même – pour le moment, seules 40 pages de « Résumé à l’intention des décideurs » ont été diffusées –, qui déroule ses pierres noires, implacable. Il avance un chiffre on ne peut plus parlant : un million d’espèces animales et végétales sont menacées d’extinction. Un million sur les huit millions qui existent sur terre et en mer, d’après les estimations des scientifiques de l’IPBES, la petite sœur du Giec. Parmi les principales victimes, les amphibiens, dont 40 % des espèces montent vers l’échafaud (lire l’épisode 68, « Le pistolet à grenouilles »), plus d’un tiers des mammifères marins, près d’un tiers des récifs coralliens et des requins, 25 % des vertébrés terrestres, d’eau douce et marins… Le déclin global est sans précédent.