À Gand (Belgique)
Dans le studio de Ralf Bouffioux, à Gand, en Belgique, un calendrier d’environ deux mètres sur deux est affiché sur le mur à gauche de la porte d’entrée. Chaque jour de chaque mois a sa case. De juillet 2023 à juin 2028. Les lignes qui le constituent sont scrupuleusement tracées au Bic noir. De façon si précise qu’on le croirait imprimé, mais non. Ralf Bouffioux est l’auteur de chaque tracé, de chaque coup de stylo. Un calendrier fait maison auquel il a dû consacrer des centaines d’heures. « Et qu’en plus je n’utilise pas ! », sourit-il. L’homme de 36 ans voit sa vie en grand. C’est un forçat, du genre opiniâtre. Un romantique. Autant de traits de caractère qui l’ont amené, il y a dix ans, à quitter sans crier gare le petit village wallon de Gesves où s’étirait une existence qu’il jugeait alors désespérante.
Devant une pinte de blanche, au premier étage d’un café flamand dont les fenêtres ciselées par les gouttes d’eau donnent sur la Lys, le trentenaire raconte ces quinze mois durant lesquels il a parcouru l’Europe à vélo, sans jamais donner aucune nouvelle à ses proches. Il retrace l’avant et l’après de cette disparition volontaire, qui a remis sa vie à l’endroit.
Il a alors 26 ans, habite encore chez ses parents. Ses études en infographie terminées, il cherche un travail dans ce secteur mais le marché de l’emploi est saturé. Il vit donc de petits boulots, dans un supermarché, des centres logistiques, « avec des horaires abominables ».