L’immense sourire d’Itziar Moreno Martinez illumine la salle d’audience. En arrivant dans le box, elle agite les bras pour saluer la trentaine de proches et soutiens qui applaudissent, lèvent le poing ou lui crient quelques mots en basque depuis les bancs du public. L’accusée de 34 ans aux boucles auburn porte un keffieh sur son débardeur noir. Son co-accusé, Oier Gomez Mielgo, crâne dégarni à 33 ans, nez busqué et maillot rouge, se colle à la vitre du box le plus près possible du public avant de s’asseoir. Tous deux ont passé les cinq dernières années en détention provisoire. Ils ont l’air curieusement rayonnants, heureux de se retrouver. La cour d’assises spéciale doit les juger, de ce lundi 19 septembre jusqu’au 27, pour tentative de meurtre sur des gendarmes, port d’armes, faux documents, vol de voiture, recel… Le tout « en relation avec une entreprise terroriste ». Ils encourent la réclusion à perpétuité. Itziar Moreno Martinez et Oier Gomez Mielgo, de nationalité espagnole, font partie de l’ETA. C’est la seule chose qu’ils aient jamais dite aux enquêteurs.

La présidente de la cour d’assises spéciale Jacqueline Audax leur demande leurs dates et lieux de naissance. Je ne souhaite pas m’exprimer
, répond l’accusée. Pareil, je ne réponds pas
, confirme son camarade, comme une formalité administrative. Aucun « élément de personnalité » ne sera évoqué à l’audience : les accusés ont refusé l’expertise psy, leur entourage n’a pas répondu aux convocations. Ils écoutent à peine le rappel des faits, accaparés par leur conversation et les gestes d’affection qu’ils envoient de temps en temps à la salle. Face à eux, assis sur le banc des parties civiles, des gendarmes leur font les gros yeux. Ils sont les principales victimes de l’affaire.
Comme le veut la loi, la présidente précise que les accusés peuvent faire des déclarations spontanées, répondre aux questions ou garder le silence
. Il faudra se contenter de ce qu’il y a dans le dossier
, prévenait leur avocate Clara Rouget Aranibar quelques jours avant l’ouverture du procès. Les militants de l’ETA ne se sont jamais expliqués. Je ne pense pas que l’on déroge à la règle.
L’avocate en sait quelque chose : installée à Saint-Jean-de-Luz, elle est intervenue dans les plus gros procès basques de ces dernières années. Celui-ci n’a aucune raison de se dérouler différemment.
D’après le dossier donc, le 9 avril 2011 à Vallière (Creuse), vers 17 heures, deux gendarmes sont chargés d’un contrôle routier de routine quand la conductrice d’une Ford C-max force le passage.