Mercredi dernier, le 2 septembre, à l’occasion d’un déplacement électoral à Wilmington, en Caroline du Nord, Donald Trump s’est fendu d’une déclaration singulière, qui a déclenché un nouveau tumulte public. Évoquant le vote par correspondance mis en place dans cet État à l’occasion de la pandémie de Covid-19, il a invité ses électeurs à aller voter en personne après avoir déjà envoyé un bulletin par correspondance, afin d’éprouver les contrôles du système. Explication présidentielle : « Si le système de vote par correspondance était aussi bon qu’ils le disent, évidemment les électeurs ne seraient pas en mesure de voter en personne. » Cette déclaration a été jugée assez grave par Karen Brinson, responsable locale des opérations de vote en Caroline du Nord, pour qu’elle publie un avertissement officiel, rappelant que voter deux fois ou essayer de le faire était un délit dans l’État, passible de trois à douze mois de prison. Et lorsque le président Trump a voulu amender sur Twitter sa première déclaration, précisant qu’il ne demandait aux électeurs de voter en personne que s’ils constataient la non-prise en compte de leur bulletin par correspondance, le réseau social a classifié ses messages comme violant ses règles contre l’incitation à la fraude électorale.
Cette offensive du président des États-Unis n’est pas surprenante : depuis les débuts de l’épidémie, au printemps (lire l’épisode 6, «Coronavirus : les États-Unis malades de leur système de santé»), il mène une guerre résolue à la généralisation en cours du système. Le Covid-19 a en effet amené 20 États et la ville de Washington à modifier leurs législations pour permettre le vote par correspondance ou en faciliter les modalités (lire l’épisode 17, « Présidentielle : le report de l’angoisse »). Des États comme celui de New York, qui ne l’autorisent traditionnellement que pour certains motifs précis, l’ont rendu accessible à tous les électeurs pour cause de coronavirus. Et d’autres, tels la Californie, le New Jersey ou le Nevada, sont allés plus loin encore, expédiant par courrier à tous les électeurs inscrits des bulletins de vote. L’écrasante majorité des gouverneurs et des pouvoirs législatifs des États ont jugé que les ravages de la pandémie (presque 190 000 décès en six mois) justifiaient d’universaliser le système, pour qu’aucun citoyen ne soit privé de son droit de vote.