
Yo La Tengo, This Stupid World (Matador Records, 2023)
Au grand jeu du groupe de rock indépendant increvable, Yo La Tengo est peut-être en train de gagner la partie à l’usure. Sonic Youth a implosé, Low absorbe aujourd’hui le deuil de sa cofondatrice Mimi Parker avant de savoir quoi faire de la suite, tandis que Pavement, Sebadoh ou Luna ont eu des existences trop chaotiques pour prétendre même s’aligner dans la course de fond. Reste donc Yo La Tengo, émergé d’Hoboken dans le New Jersey en 1984 et jamais mis sur la touche depuis, qui revient aujourd’hui avec un dix-septième album impérial et serein nommé This Stupid World. Un disque qui est bien davantage qu’un album de plus dans une discographie au minimum passionnante, et fait preuve d’un sens du contrôle que le trio américain n’a pas toujours voulu laisser s’exprimer au long de ses bientôt quarante années de musique.
Yo La Tengo, qui tire son nom d’une anecdote de baseball venue de 1962, c’est avant tout Ira Kaplan à la guitare et Georgia Hubley à la batterie, mari et femme dans le civil, qui se partagent aussi le chant depuis à peu près toujours. La troisième partie du triangle a un temps été flottante, avant que le géant paisible James McNew ne parvienne à durer à la basse entre les deux fortes têtes du couple à partir du début des années 1990

Plutôt que sur les effets de manche et les coups sans lendemain, Yo La Tengo a misé sur la solidité et la fidélité pour se construire un public de fans décidés un peu partout. Jusqu’à pénétrer tranquillement la psyché musicale rock du XXI