Jazmine Sullivan, Heaux Tales (RCA, 2021)
Souvent, les plateformes de streaming – et Spotify en premier – veulent imposer l’idée que pour exister dans le monde actuel de la musique il faut tirer dans tous les sens, sortir de la musique sans arrêt, occuper le terrain jusqu’à épuisement. La réalité est bien plus compliquée que cela, heureusement, et le nouvel album de Jazmine Sullivan vient nous le rappeler. Car l’Américaine, chanteuse et compositrice brillante d’un genre qui fait le plein partout sur internet, le R’nB moderne, pourrait jouer à ce petit jeu et multiplier les sorties. Mais rien de tout cela. Heaux Tales est son quatrième album depuis 2008, marqueur patient d’une carrière remarquablement économe et pauvre en déchets. Jazmine Sullivan, c’est une poignée de disques tous remarquables – ce nouveau ne faisant pas exception – et des collaborations choisies qui naviguent entre le R’nB exigeant, le hip-hop lettré et la pop curieuse, auprès d’Anderson .Paak, Kindness, Frank Ocean (Blond), Mary J. Blige ou Monica.
Jazmine Sullivan, 33 ans aujourd’hui, est une discrète. Fille d’une choriste du grand label afro-américain des années 1970 Philadelphia International, pourvoyeur d’une soul luxuriante qui annonçait aussi la house et le R’nB, elle a appris à chanter très tôt avant d’en faire sa formation scolaire et de débuter dans différents chœurs de sa ville, Philadelphie. C’est là que sa voix de mezzo-soprano pleine de grain, claire mais pas lisse, a vite été repérée.