
Camélia Jordana, Facile x Fragile (Dhaouw Productions, 2021)
C’est son moment et il n’est pas volé. Avec son quatrième album, le double Facile x Fragile, Camélia Jordana, 28 ans, écrit son récit grand public sans effacer tout ce qu’elle est en musique et en dehors de la musique. La variété en français en a vraiment besoin pour aider à refermer une trop longue période où la musique populaire
Il faudrait vraiment faire semblant pour considérer que tout cela est nouveau chez elle, qui se cognait déjà Jean-François Copé, alors président du groupe UMP (actuel LR) à l’Assemblée nationale, en 2010 à la télévision sur l’interdiction de la burqa. C’était tout juste au lendemain de son surgissement médiatique et musical dans la septième saison de Nouvelle Star, où on voyait déjà une grande chanteuse capable d’imposer son phrasé très jazz à des chansons déjà épuisées. Depuis, on a découvert une artiste qui n’hésite pas à l’ouvrir pour défendre ce qui lui tient à cœur même si elle n’est pas venue pour ça, à jouer pleinement son rôle de citoyenne privilégiée parce qu’invitée à la télévision ou à la radio. Depuis, Camélia Jordana a poursuivi cette carrière étonnamment cohérente en esquivant tout ce qui aurait pu l’étouffer et défriser sa musique : elle a monté son label, Dhaouw Productions, pour gagner son autonomie artistique et débuté une carrière d’actrice qui a libéré sa musique de l’objectif de succès commercial. En 2019, son troisième album, Lost, était dans ce sens déjà une déclaration d’indépendance, un disque en anglais et en arabe, sombre et plein de méandres électroniques pas du tout dragueurs pour son public qui l’a connue en chanteuse de variété. Réussite musicale mais projet difficile à faire exister. Finalement à peine défendu par sa maison de disques d’alors, Sony Music, Lost a été un échec commercial et un divorce humain.