Mr. Mitch, Lazy (Gobstopper, 2021)
Habituellement, Miles Mitchell quitte son domicile du sud-est de Londres le jeudi ou le vendredi pour voyager à travers le Royaume-Uni et l’Europe et jouer sa musique devant des clubs électronique chauffés à blanc. Là, sous le pseudonyme Mr. Mitch, il a navigué ces dernières années entre le grime, cet enfant nerveux du ragga, du rap et de l’électronique, et une musique très personnelle au tempo ralenti, soyeuse et interrogative. D’un côté, il a ainsi été le producteur remarqué de titres pour Skepta ou Katy B, ainsi que le tenancier du label Gobstopper et des soirées Boxed, ancrées dans le grime qui s’apprécie en groupe la nuit. De l’autre, il a publié Parallel Memories (2014) puis Devout (2017), beaux disques d’intérieur qui réfléchissent notamment sur la vie de famille et la parentalité.
Tout ça, c’était avant. Car depuis un an, comme le monde entier, Mr. Mitch est coincé chez lui avec ses trois enfants, son boulot en journée et sa musique quand il peut, dans les interstices de cette vie bizarre que l’on mène en temps de Covid, répétitive mais libérée de tellement de sollicitations sociales qu’elle offre aussi du temps pour faire et penser. « Est-ce qu’on s’est dit au revoir ? », demande ainsi son nouvel album, Lazy, dès son deuxième morceau (Did We Say Goodbye), dans un exercice de techno en sourdine comme s’il ne fallait pas réveiller les enfants. Non, on n’a pas réellement eu le temps de dire au revoir à nos vies d’avant, aux concerts, aux clubs où l’on danse, à cet apprentissage permanent du corps, à la légèreté de tout cela aussi. Tout a disparu en quelques semaines et Lazy s’est construit comme un hommage à ces moments musicaux qui manquent au cerveau autant que comme une rêverie sur les sensations que Mr. Mitch vivait sans y penser chaque fois qu’il partait pour exercer son art : les murs qui vibrent de plus en plus tandis que l’on arrive dans la salle, les beats étouffés par les portes, les basses qui envahissent le corps un peu plus à chaque marche d’escalier. Tout cela est contenu dans Lazy, dans une version miniature et intérieure, mais décidée. C’est très beau et très mélancolique en même temps.
Mais Mr. Mitch n’est pas du genre à regarder derrière lui en chouinant. Si son troisième album s’appelle