Combien de temps encore ? Combien de temps encore CNews va-t-elle laisser son antenne ouverte à un délinquant ? Combien de temps encore la chaîne de Vincent Bolloré, qui bénéficie d’une autorisation d’émettre gratuitement sur l’ensemble du territoire en échange du respect des lois de son pays, continuera-t-elle à faire son beurre avec Éric Zemmour ? Une première réponse a été apportée ce jeudi, mais elle est indirecte. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a lancé un sévère, mais pour l’heure bien indolore, avertissement à LCI pour avoir retransmis en intégralité le discours de haine prononcé par Éric Zemmour à la Convention de la droite (enfin, essentiellement de l’extrême droite) le 28 septembre dernier à Paris. Mais depuis désormais deux semaines et huit émissions, une heure durant chaque soir, Éric Zemmour copie-colle ce même discours de haine sur CNews. Il le décline en toute impunité, pour l’instant, et sans qu’aucun des dirigeants de Canal+ n’y trouve à redire
« Quand le général Bugeaud arrive en Algérie, il commence par massacrer les musulmans, et même certains juifs. Et bien moi, je suis aujourd’hui du côté du général Bugeaud. C’est ça, être Français. » Ça, c’était la saillie d’Éric Zemmour mercredi soir sur CNews, se rangeant définitivement du côté de l’infamie et de ce militaire français, resté dans l’histoire pour avoir colonisé l’Algérie dans le sang à la moitié du XIXe siècle. Ce jeudi soir, il nous faisait sa petite crise de nerfs sur le féminisme. Mais voilà que le CSA a agi, trois semaines après la diffusion de son discours sur LCI (trois semaines oui, pour l’instance, on vous jure que c’est rapide). Le Conseil, présidé depuis février dernier par Roch-Olivier Maistre, un haut-fonctionnaire, a pris la décision, très rare en trente années d’existence du CSA, de confier le bébé à la justice. Le parquet de Paris ayant ouvert une enquête pour « injures publiques en raison de l’origine » et « provocation publique à la discrimination » après le discours de Zemmour à la Convention de la droite, le CSA, « en raison de la gravité de ces propos », a choisi de transmettre au procureur « les éléments en sa possession […] pouvant être utiles à l’enquête ».

Et c’est l’article 40 qu’invoque le CSA, celui, rendu célèbre par l’affaire Benalla (où il n’avait précisément pas été invoqué par l’Élysée après le bastonnage de la Contrescarpe), qui contraint tout fonctionnaire ayant « connaissance d’un crime ou d’un délit » « d’en donner avis sans délai au procureur de la République ».