Pour sûr, il se passe quelque chose. Qui aurait imaginé, il y a quatre mois, que cette place devenue mausolée, où le moindre pétard faisait déguerpir les passants au pas de course, se transformerait en assemblée générale à ciel ouvert ? Est-ce bien ici qu’une manifestation contre la COP21, interdite pour cause d’état d’urgence, a débouché sur 317 gardes à vue ? Pour le sixième soir consécutif, mardi 5 avril - pardon, mardi 36 mars comme on dit ici depuis le 31 mars -, la foule de la Nuit debout a occupé une grosse moitié de la place de la République.
Entre ceux qui passent jeter un œil juste une heure à la sortie du boulot et les irréductibles fesses scotchées au pavé tard dans la nuit, difficile de compter les participants. Au plus fort de la soirée, un à deux milliers sans doute. Si la Nuit debout a montré qu’elle pouvait attirer du monde, nul ne sait à quoi elle peut mener : des amitiés de circonstance, le dernier salon où l’on cause, le « Podemos à la française » qui permettrait de coller une étiquette sur l’insaisissable, une intervention de police qui tournerait mal, ou de l’eau de boudin. Dans dix ans, dira-t-on J’ai fait la Nuit debout
avec un sourire entendu, comme J’ai fait le CPE
?
Ce mardi comme tous les débuts d’après-midi, on dirait qu’il ne s’est rien passé. Les manifs lycéennes et étudiantes arpentent d’autres quartiers de Paris. Vidée de ses occupants, nettoyée par la voirie, la place de la République fait peine à voir.