La Nuit debout commence de plus en plus tôt place de la République, à Paris. En l’occurrence, vers 14h30 côté est du parvis, où un rond s’est formé pour discuter de démocratie et liberté d’expression
, comme l’explique la modératrice. Attention, on n’est pas là pour donner son avis sur celui-dont-il-ne-faut-pas-dire-le-nom, qui est juste un prétexte pour parler
. Mais monsieur Gnagnagnagnagna n’est pas moins l’unique détonateur de cette « agora » émergée de la commission démocratie de Nuit debout.
Car l’académicien acariâtre a posé au mouvement quelques questions existentielles en se faisant jeter sèchement de la place de la République samedi soir à coups de facho
.
Finkielkraut, donc, qui était le sujet d’une prise de parole sur deux malgré tous les recadrages et les gestes exaspérés des habitués. « Ce qui peut être une ligne de partage entre ceux qu’on accepte ou pas, ce sont les boutiquiers, lance un homme assis en tailleur. Est-ce qu’il vient vendre sa sauce ou juste assister ? » En l’occurrence, [Finkielkraut] a assisté une heure à l’assemblée générale
, complètera un peu plus tard une jeune femme. Ici, l’objectif est justement de donner la parole à des gens qui ne l’ont pas dans les médias
, continue un autre. Donc pas à Finkielkraut, qui a une émission depuis 1980 sur France Culture et une chaise molletonnée à son nom sur tous les plateaux des chaînes d’info.

Justement, une jeune femme en rouge prend la parole pour la première fois. Deux nattes entourent son visage rougi par le soleil qui chauffe enfin un peu cette Nuit debout jusqu’ici plutôt froide et humide : Pour moi, on a le droit de s’opposer à des idées à partir du moment où elles sont exprimées, pas à partir de la biographie d’une personne. Sinon, on peut tous être exclus et moi, là, je suis contente de pouvoir vous parler librement.
Sa position soulève d’office l’un des nœuds du débat qui occupera toute l’après-midi et réunira la plus vaste assistance de Nuit debout : doit on décider que Finkielkraut est détestable parce qu’il l’est depuis des années, ou le laisser exprimer ses idées détestables pour en décider ?
Simon, un habitué de la place qui participe activement à ce débat, est pour juger sur des actes : Faudrait pas qu’on reproduise la violence symbolique que l’on dénonce dans la société.
Mais à sa droite, une certaine Galatée explique que la commission accueil et sérénité de Nuit debout chasse régulièrement des soraliens et des dieudonnistes
de la place de la République par principe.