Mécène du Louvre, proche de François Hollande et de Jamel Debbouze, fondateur d’une fondation pour la culture et la diversité… Marc Ladreit de Lacharrière a le profil d’un PDG bien sous tous rapports. Lui au moins, n’est pas du genre à fuir outre-Quiévrain
, écrivait Libération en 2013, juste après l’affaire Bernard Arnault – le PDG de LVMH vilipendé pour avoir voulu s’exiler fiscalement en Belgique. Mais derrière la tête du sympathique grand-père, il y a l’homme d’affaires Ladreit de Lacharrière qui, on l’a vu (lire l’épisode 11, « Mon ennemie la finance, mon ami l’optimisateur fiscal »), n’hésite pas à utiliser le Luxembourg pour y loger des holdings et faire de l’optimisation fiscale – car, comme il nous l’a expliqué, dans le milieu des affaires, tout le monde le fait
. Surtout, ce qui n’est pas banal, le financier a transféré au Grand-Duché l’essentiel de sa fortune. Les Jours sont en en effet en mesure de révéler que, depuis 2010, grâce à un montage jusque-là caché, 70 % de sa participation dans son groupe, Fimalac (soit 1,4 milliard d’euros, selon l’évaluation faite par Challenges), sont logés au Luxembourg. Un montage destiné à éviter un démantèlement de Fimalac au décès de son fondateur.
Le Luxembourg, une transmission d’entreprise et des centaines de millions d’euros en jeu… Pas besoin d’avoir mauvais esprit pour imaginer que le tropisme grand-ducal de Ladreit de Lacharrière a quelque chose à voir avec la fiscalité. Au Luxembourg, l’imposition des successions est beaucoup, mais alors beaucoup plus douce qu’en France. Ici, les enfants peuvent payer jusqu’à 45 % de taxes quand, là-bas, les héritiers en ligne directe sont exonérés. Cela doit faire envie quand, comme Ladreit de Lacharrière, on a deux milliards d’euros à transmettre à quatre enfants. Seulement, pour en bénéficier, il faut être considéré comme résident fiscal luxembourgeois par l’État français. Cela veut-il dire qu’on peut se préparer à un exil de la part du financier et de ses enfants ? L’intéressé, interrogé en marge de l’assemblée générale de Fimalac, le 15 juin dernier, nous l’a démenti. Vous pensez qu’avant ma mort je vais prendre un avion et aller au Luxembourg ? Par définition, quand je meurs, je vais mourir en France, je vais payer des impôts en France.
Les étrangers sont plus intéressés à faire des affaires à l’étranger qu’en France.
Mais faut-il prendre au sérieux ces dénégations alors que l’intéressé a été incapable de nous donner une explication crédible à l’« exportation » de sa fortune ? Selon Ladreit de Lacharrière, aucun problème fiscal
n’est en jeu, mais une question d’alliance avec des investisseurs
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