Luxembourg, envoyé spécial
«Merci Antoine, merci ! Merci Édouard, merci ! », La relaxe ! La relaxe !
Il est 8h30, le mardi 26 avril. Se frayant un chemin au milieu des cris, des chants et des caméras, Antoine Deltour, ex-salarié de PricewaterhouseCoopers (PwC), suivi peu après du journaliste de Cash Investigation Édouard Perrin, arrivent au tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour l’ouverture de leur procès. Des militants portent des pancartes aux slogans dénonciateurs : Ne mettez pas les lanceurs d’alerte en prison
, Transparence fiscale maintenant
ou Combien de scandales avant la transparence ?
. À première vue, tout laisse à penser que la population luxembourgeoise s’est mobilisée en masse pour aller soutenir le lanceur d’alerte et le journaliste qui sont à l’origine de l’affaire LuxLeaks.
Mais la réalité est plus prosaïque. Les militants présents devant le tribunal sont une cinquantaine à peine, moins que les journalistes, et majoritairement français : il y a là des membres de la Plateforme paradis fiscaux et judiciaires et du comité français de soutien à Antoine Deltour (lire l’épisode 3, « Alerte au paradis »). Le Luxembourg s’intéresse à l’affaire, mais de là à se lever tôt pour s’afficher avec des prévenus qui ont mis à mal le modèle économique du pays, et dont le procès rappelle que le Luxembourg est un paradis fiscal pour les entreprises, il y a un pas que peu ont fait. Les Luxembourgeois présents font partie d’une minorité agissante qui essaie de faire bouger l’état d’esprit au Grand-Duché.
Justin Turpel est de ceux-là. L’ex-député de Déi Lénk, proche de David Wagner, se mobilise depuis des semaines pour montrer un autre visage de [son] pays
. Le 1er avril, il a créé un comité luxembourgeois de soutien à Antoine Deltour et Édouard Perrin, s’est démené pour faire signer des représentants d’ONG, de syndicats, des journalistes… Nous l’avions alors rencontré et il se montrait particulièrement heureux d’avoir réussi à faire signer une quarantaine de personnes. Un exploit pour le Luxembourg.
Le 25 avril, la veille du procès, Justin Turpel a organisé une soirée de mobilisation au Casino syndical, situé dans le quartier populaire de Bonnevoie, un rendez-vous habituel des manifestations de l’extrême gauche. Et, à en croire son organisateur, la soirée a été une vraie réussite. Au moins 200 personnes sont venues écouter notamment des représentants d’ONG luxembourgeoises ainsi que le président du syndicat des journalistes, Luc Caregari, exprimer leur soutien aux prévenus.