Jeudi dernier, le parvis du collège Aimé-Césaire ressemblait à celui d’une mairie un jour de mariage. Garçons en chemises impeccablement repassées et chaussures nickel. Filles en jupes (ce qui n’arrive jamais) et coiffures sophistiquées. Jeudi, les troisièmes n’avaient pas cours. Ils passaient leurs oraux de stage. La tenue compte dans la note. Cinq minutes d’exposé et cinq minutes de questions devant deux de leurs professeurs, 40 points qui compteront pour le brevet et un stress palpable, qu’on ne leur connaissait pas, même les jours de brevet blanc. En dehors du dress code, les élèves sont notés sur leur expression orale, leur capacité à présenter l’entreprise et à répondre à des questions… Mais l’oral de stage, c’est un peu comme L’École des fans. À la fin, généralement, tout le monde a une bonne note.
Bonjour, je m’appelle Vithuran, je suis en 3e B et j’ai effectué mon stage au garage 4F Auto à Pantin dans le 93.
Vithuran a des souliers qui brillent et une chemise blanche amidonnée. Face à lui, il y Antoine Labaere, son prof principal et Bruno Franceschi, un autre enseignant du collège. Moi, ce qui m’intéresse dans la vie, c’est l’automobile. Et il me semble qu’il fallait que je commence par la base : la mécanique.
Vithuran a l’aisance et le sourire du commercial né. Pas une seconde on ne peut se douter qu’il a trouvé son stage à l’arrache, trois jours avant qu’il ne débute, ni qu’il n’a jamais rendu son rapport de stage écrit pour cause de poil dans la main
, résume un de ses profs.

Derrière lui, sur le tableau numérique, défilent les photos du garage où il a été stagiaire durant une semaine en février dernier (lire épisode 13, « Le stage de troisième »). Il explique les règles de sécurité, les outils utilisés, donne beaucoup de chiffres : la surface de l’atelier au mètre carré près, le poids supporté par les plateformes d’élévation… On m’a confié des tâches de plus en plus intéressantes, j’ai énormément appris. Quand on nous fait confiance, on a envie de bien faire, ça nous responsabilise.
Pour autant, Vithuran, n’envisage absolument pas de travailler dans un garage automobile, surtout depuis son stage. Trop dur, jamais j’aurais imaginé.
Il a gardé un souvenir visiblement douloureux d’un jour de grand froid. Je ne sentais plus mes mains.
Vithuran s’en tire haut la main, avec un 40 sur 40.
Arrive à sa suite Mariama, mini-jupe, petite veste cintrée et nattes remontées en superbe chignon.