Vendredi, Nina s’est fait avaler par la machine. Au collège, tous les élèves connaissent et redoutent la machine, même s’ils ne comprennent pas vraiment comment elle fonctionne. La « machine » s’appelle Affelnet, et c’est le logiciel de l’Éducation nationale qui décide dans quel lycée sera affecté chaque élève de troisième. À Paris, elle répartit chaque année 11 000 élèves dans 74 lycées. La machine a été pensée pour être plus juste, plus impartiale et plus efficace que les humains de l’Éducation nationale. Mais parfois, elle ne l’est pas.
Vendredi dernier, à 11 heures, en sortant de leur dernière épreuve de brevet, les 3e B doivent se voir remettre cette fameuse affectation par leur professeur principal. Ils sont angoissés. Bien plus que pour le brevet, cet examen qui ne sert à rien
(selon eux). Antoine Labaere, lui, est carrément livide. Avant de voir les autres élèves, il a dû annoncer à Nina qu’elle n’est affectée nulle part
. Pas de lycée, rien
, me répète-t-il, sans sembler y croire lui-même. Il me redonne la moyenne de ses notes : plus de 12 sur 20. C’est incompréhensible.
La machine s’est enrayée. Affelnet, c’est la loi du marché, celle de l’offre et de la demande, ça peut être dur
, résume Jean-Louis Terrana, le principal du collège.
En pleurs, Nina a été prise en charge par la principale adjointe.