«Là, ça m’énerve », peste Nicolas. En blouse grise et chaussures de sécurité noires, l’uniforme obligatoire que doivent passer les élèves de seconde Production conception mécanique (PCM) quand ils entrent dans l’atelier, l’adolescent force un peu avant de lâcher sa pince. « Je n’arrive pas à la mettre dans l’écrou. »
Huit heures par semaine, encadrés par Stéphane Paillot et Alain Konyk, les élèves de PCM apprennent à utiliser des machines dans le vaste atelier baigné de lumière du lycée de Fontaineroux. Quatre heures supplémentaires sont consacrées à la théorie, la CAO (conception assistée par ordinateur) et la technologie.
Un groupe fait du fraisage, l’autre du tournage. Le lieu, intimidant le jour de la rentrée scolaire (lire l’épisode 3, « La salle de classe des machines »), devenu familier, est l’un de ceux que les élèves préfèrent. Ici, ils « kiffent » apprendre à fabriquer des pièces « tout seuls ». En ce moment, ils confectionnent un support de téléphone portable. Bruno, qui voit bien que Nicolas – que tout le monde appelle par son nom de famille, Ribeiro – n’y arrive pas, prend le relais. Les élèves travaillent en binômes, formés au début de l’année scolaire. Au bout de quelques minutes, il soupire. « Bon, on demande au prof ? » Nicolas veut essayer une dernière fois. « Bruno ! C’est bon ! C’est bon ! »
Plus loin, Kalvin et Mohammed jaugent leurs outils et reportent les mesures au crayon noir dans un tableau. Mohammed s’applique. Il aimerait bien avoir des bonnes notes. « En sciences, une fois, j’ai eu 13, ça m’a choqué. » Kalvin s’est habitué aux notes au-dessus de la moyenne. « Mais toi, t’es né ici, lui fait remarquer Mohammed. Moi, je parle pas bien français… C’est difficile certaines matières. J’ai 17 ans. C’est la honte un peu, je suis le plus grand. » Arrivé en France il y a quatre ans, Mohammed est algérien. Après un an en classe d’accueil où il a appris le français, il a rejoint une troisième « normale ». Puis la seconde pro.
« On forme un super binôme mais on a mal commencé, rigolent Guillaume et Benoît. On a cassé une pinule. On l’a fait tourner à 5 000 rotations par minute au lieu de 500. Mais depuis, on s’est améliorés. » Penchés sur leurs classeurs, ils relisent la liste de gestes à exécuter et les schémas explicatifs pour parvenir à « tangenter à l’aide d’une pinule ». C’est l’énoncé de l’exercice. Les garçons ont l’impression d’avoir loupé une étape, mais laquelle ? Aïssa s’approche :