Le photographe suisse Matthieu Zellweger est un habitué des sujets que l’on pourrait facilement qualifier d’infaisables. Après avoir travaillé sur des personnes ayant tenté de mettre fin à leurs jours (J’ai choisi de vivre), sur le trouble bipolaire (Handicap invisible) ou encore sur la douleur des naissances d’enfants morts-nés (Le bébé n’a pas crié), c’est au métier d’assistant sexuel qu’il consacre sa série Amour inconditionnel. Encore interdite en France, car assimilée à la prostitution, cette activité professionnelle est légale en Suisse, où les assistant·e·s ont le statut de travailleurs et travailleuses du sexe et doivent suivre une formation avant d’exercer. L’activité d’assistant sexuel consiste à accompagner le plaisir sensuel, érotique ou sexuel des personnes en situation de handicap.
Les images de Matthieu Zellweger, à l’aise pour travailler dans l’hyperproximité et le huis clos d’une chambre, sont évidemment très crues. Dans la photographie de reportage, on met souvent en valeur le talent des photographes à se faire oublier, comme s’il fallait disparaître pour obtenir de bonnes images. Or, ici, Matthieu Zellweger assume sa présence, reste « collé » aux sujets et n’hésite pas à aller chercher des images fortes. Il ne nous épargne ni les corps meurtris ni l’âpreté de la maladie, mais ce n’est jamais gratuit. Au-delà d’un aspect didactique, photojournalistique, chaque image dégage un profond respect pour l’engagement hors norme des assistant·e·s.