Comme souvent, le premier échange entre Zoubeir et un sympathisant jihadiste ne se fera ni dans une mosquée, ni dans son quartier mais sur internet. C’était sur un forum qui n’avait rien à voir d’ailleurs avec le jihadisme. Je cherchais un renseignement sur l’islam politique et je suis tombé dessus complètement par hasard. Une personne m’a parlé de sa vision de l’islam et du jihad pour la première fois. C’était un jihadiste de France.
Cette première discussion a lieu en avril 2013, Zoubeir n’a que 16 ans et se réclame du salafisme quiétiste. Il part en Syrie à peine sept mois plus tard, en octobre.
À mesure qu’il s’intéresse à la jihadosphère, il rompt très rapidement avec les milieux quiétistes. Sur Facebook, Zoubeir s’abonne à des pages prônant la hijra, le départ de France et l’émigration en terre de jihad, comme « Wake Up Ouma » qui n’existe plus. Selon le jeu de l’enfermement algorithmique, il noue des premiers contacts jihadistes sur cette plateforme grand public. Puis d’autres sur un réseau social dédié aux initiés, sorte de Facebook jihadiste en français aujourd’hui disparu, « Ansar Ghuraba ».
Dans les onglets favoris de Zoubeir, pour lire des textes des grands référents idéologiques, figure également le forum francophone historique « Ansar al Haqq », désactivé à l’été 2015. Je les ai connus en cherchant des réponses à mes questions : est-ce que le jihad fait partie de l’islam ? S’il fallait le faire ? Etc. Quand j’étais dans cette logique salafiste, je cherchais beaucoup sur internet tous leurs savants, leur idéologie. Ce n’est plus : tu fais 3 000 km pour qu’un savant réponde à tes questions, maintenant le truc ça se fait sur internet. Tu poses des questions, ils te répondent.

Viennent ensuite les premières rencontres physiques. Après des échanges sur les réseaux sociaux, Zoubeir rencontre pour la première fois « IRL », in real life comme on dit sur internet, celui avec lequel il partira en Syrie. C’est dans une manifestation destinée à dénoncer des agressions de femmes en niqab, en région parisienne.