De Montpellier
Il y a la scène et il y a les coulisses. Le show socialiste de belle facture signé Benoît Hamon et les arrière-cours inquiétantes de la vieille maison socialiste où luisent les dagues dans les recoins. La vie militante où il faut y croire (ou faire comme si) et la survie de l’appareil politique où l’on échafaude déjà les scénarios de l’après-défaite du « petit », surnom donné par le patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, et ses proches au vainqueur de la primaire.
Nous voilà donc ce jeudi soir avec quelque 3 500 militants, sympathisants, obligés et curieux dans un vaste parc des expositions, loin du centre-ville de Montpellier. Le candidat socialiste à la présidentielle tient meeting. Les murs tremblent, les sondages en berne et trahisons quotidiennes alimentent la déprime, mais la fédération de l’Hérault a bien fait le job : salle garnie, des jeunes devant avec des drapeaux siglés du logo du parti, d’autres tricolores et européens. Des bus affrétés depuis les départements voisins, remplis de fonctionnaires et retraités souvent issus des collectivités territoriales contrôlées par le Parti socialiste. Rituel du meeting avec décorum bien en place, comme depuis des décennies.
On s’est toujours relevés des défaites au PS. Mais là, c’est vrai que ce n’est pas pareil…
Le premier fédéral, Hussein Bourgi, se livre à un exercice diplomatique à haut risque en plaçant sur les sièges des premiers rangs, au milieu, les cartons au nom des huiles PS du cru (parlementaires, présidente de région, patron du département, maires, amis du candidat…). Mais deux députés manquent à l’appel dans les cartons de Bourgi : Patrick Vignal (lire l’épisode 7, « Macron : le PS en ordre dispersé ») et Anne-Yvonne Le Dain, en partance chez Macron.
Hamon est en retard alors le chauffeur de salle tente un truc. « La légende dit que c’est ici, à Montpellier, que vous êtes les plus chauds… Alors faites du bruit ! » Les premiers rangs des jeunes s’époumonent mais partout à l’arrière, c’est un bide. Je m’assois à côté de Daniel, 52 ans, mécanicien, venu de Toulouges, près de Perpignan : « Tant que les gens ne quittent pas trop le bateau, ce n’est pas mort. On s’est toujours relevés des défaites au PS. Mais là, c’est vrai que ce n’est pas pareil… »
Un influent député du cru qui réclame le « off » m’explique pourquoi le parti et le Premier ministre sont en service minimum pour leur candidat, « afin de le maintenir autour des 10 %, pas plus ». À l’entendre, au soir du premier tour, Benoît Hamon sera remercié et donc viré après cette défaite historique et n’aura pas la possibilité de peser sur les négociations des législatives comme il voudrait le faire en se tournant vers Mélenchon et les écologistes.