De Sète
La pluie sans fin, épaisse et qui détrempe. Un vrai temps de hollandais pour Sébastien Denaja, député de l’Hérault ultrafidèle au chef de l’État, devenu porte-parole du candidat Hamon au lendemain de la primaire et érigé en symbole du rassemblement socialiste. En cette fin de mois de mars, sur le marché de Sète, il faut bien faire le job. Tétanisés par le venin quotidien des « camarades » en partance chez Macron ou en pâmoison devant Mélenchon, les socialistes – les vrais ! – mènent malgré tout campagne. Certes sans grandes illusions, mais avec la conviction que, cette fois, c’est bien la survie du parti imaginé par François Mitterrand en 1971 au congrès d’Épinay qui est en jeu. Alerte maximale. Dans son bureau, à l’étage de sa permanence sétoise, Sébastien Denaja jongle avec les SMS, les demandes de réaction en chaîne au débat Fillon-Angot de la veille, au ralliement à Macron du ministre de la Défense Le Drian ou à Mélenchon qui passe devant Hamon dans les sondages… Sale boulot. Il rigole : ce matin encore, un journaliste l’a appelé à la télé le « porte-parole de François Hamon ».
Le président de la République est omniprésent à ses côtés. Dans le bureau de sa permanence : un grand portrait de François Hollande, trois photos encadrées où on les voit ensemble. Il y a aussi ces coups fils réguliers entre eux. Et ces réunions à Paris chaque lundi autour du ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, autre martyr du hollandisme, déterminé à entretenir jusqu’au bout la foi des derniers croyants. Dans ce petit cénacle – « où on m’invite », précise le député –, « je peux faire passer le message qu’il faut rester loyal, ne pas déconner. C’est aussi pour le parti de Jaurès, des congés payés et de la CMU que je fais tout ça. Et par fidélité à une communauté de personnes auxquelles je suis attaché depuis vingt ans ». Référence à ceux qui partent chez Macron (lire l’épisode 7, « Macron : le PS en marche dispersée ») ou se dispensent de faire campagne pour Hamon, et donc pour le parti (lire l’épisode 9, « Derrière Hamon, des militants à reculons »).
Nous voilà donc sous la pluie, marché désert et commerçants plantés comme les piquets de leurs bâches. Première halte en terrasse (couverte) du café Victor Hugo. Les partisans de Nicolas Dupont-Aignan et de Jean-Luc Mélenchon y sont déjà, tout le monde se claque la bise. « Pas de photos, s’il vous plaît : on se connaît, on se respecte, c’est petit ici… », lance une voix.