La crise du Levothyrox n’est-elle qu’une crise d’information ? Plus d’un an après le changement de formule du médicament, la réponse est évidemment non. Plus de 30 000 signalements d’effets secondaires – un record en France – ne peuvent s’expliquer uniquement par un défaut de communication à l’égard des patients ou des professionnels de santé. Ni seulement par une mauvaise prise en compte du ressenti des malades. Mais l’information autour du médicament est le sujet du rapport commandé par la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, fin 2017, au plus fort de la crise liée à la nouvelle formule du Levothyrox, et qui lui a été remis lundi 3 septembre. Ce volet de la crise ne porte donc pas sur deux points essentiels, relégués au rang des questions sans réponse. Pourquoi avoir changé la formule d’un médicament qui soignait quotidiennement 3 millions de personnes de façon satisfaisante depuis trente ans ? Le manque de « stabilité » invoqué par l’Agence du médicament (ANSM) n’a pas été prouvé. Et surtout, comment expliquer scientifiquement cette cascade d’effets secondaires ? Le mystère persiste. Dans ce contexte, les défauts d’information, c’est moins anxiogène.
Pourtant, le document remis à la ministre de la Santé ne retient pas trop ses coups. Les deux rapporteurs ne sont pas tendres avec la gestion du problème Levothyrox par les autorités sanitaires. Ils pointent « l’absence d’anticipation et d’accompagnement » autour du changement de formule du médicament, sensible et difficile à stabiliser : « Les caractéristiques inhérentes au produit, le monopole du laboratoire, les précédents, ainsi que le grand nombre de patients concernés auraient dû inciter les pouvoirs publics à informer plus largement, plus clairement et publiquement », écrivent-ils. Le rapport qualifie aussi la communication de crise d’« artisanale » et dénonce « l’absence de réaction aux nombreux signaux pourtant facilement capturables sur la toile », notamment une pétition lancée en ligne sur le site Change.org dès juin 2017. « Une minimisation du ressenti des patients et de la légitimité de leurs signalements » est aussi dénoncée. Enfin, selon les deux auteurs, des « manquements à la transparence et à la réactivité qu’on est en droit d’attendre des autorités de police sanitaire » ont caractérisé cette crise, à l’image des précédentes liées au Mediator ou encore à la Dépakine. À ce stade, le tableau des dysfonctionnements semble assez complet.

Depuis l’arrivée de la nouvelle formule en mars 2017, les patients victimes d’effets secondaires ont bel et bien rencontré les pires obstacles pour se faire entendre.