Italie et Grèce, envoyée spéciale
«Regardez. Vous avez là deux photos de la même personne. » Vittorio Piscitelli a tourné son écran d’ordinateur vers moi. À gauche, une photo d’une jeune femme souriante, en tenue de fête, boubou coloré et fichu taillé dans le même tissu. À droite, une image de médecine légale, portrait froid d’un visage sans expression. « La dentition et le lobe de l’oreille sont toujours uniques, propres à chaque individu, exactement comme les empreintes digitales. Les photos envoyées par les familles sont d’une grande aide dans le travail d’identification. » Vittorio Piscitelli dirige le Bureau des personnes disparues à Rome. C’est lui qui représente les autorités italiennes dans le processus d’identification des migrants disparus et coordonne le travail de la justice et de la recherche des familles. Il est la première personne que j’ai rencontrée quand je me suis intéressée à l’histoire du chalutier bleu et des 800 personnes qui ont péri à son bord en avril 2015, au large des côtes libyennes. Parmi elles, PM390047, dont il ne reste qu’un téléphone Nokia jaune citron et dont je cherche à remonter la trace dans cette enquête (lire l’épisode 1, « PM390047, un mort en Méditerranée »). En mai 2016, je m’étais rendue dans le bureau de Vittorio Piscitelli, installé dans un bâtiment du ministère de l’Intérieur italien, juste à côté de la gare de Termini, à Rome.
Nous attendions alors tous les deux l’arrivée de l’épave en Sicile.