Enfin un meeting. Enfin, dans une campagne municipale constellée de « déambulations » (c’est-à-dire qu’on marche) ici et là pour serrer des louches, enfin une foule soulevée par le souffle venu de la tribune, des drapeaux qu’on agite, des vivats qui nous emportent, enfin ce moment où on prend la température, non pas pour voir si on a chopé le coronavirus, mais pour sentir si les Parisiennes et les Parisiens ont attrapé la fièvre de la politique, des idées, s’il y a une exaltation, une envie, quelque chose qui nous dépasse, quoi. Et puis on est allés au meeting d’Anne Hidalgo.
Pour la candidate socialiste (on l’oublie, et elle aussi qui ne prononce jamais le mot, banni d’ailleurs du matériel électoral), c’était ce mercredi soir à l’Élysée-Montmartre, une salle de concerts du XVIIIe arrondissement de Paris, au pied de la butte. Rachida Dati, ce sera le 9 mars dans la nettement plus sélecte salle Gaveau – Nicolas Sarkozy est annoncé, mais comment va-t-on s’habiller ?– et Agnès Buzyn, heu on sait pas, la salle a dû être réservée au nom de Benjamin Griveaux. On longe la portion aérienne de la ligne 2 du métro, sous laquelle se tient l’habituel « marché aux voleurs », où des pauvres vendent des lames de rasoir, du shampoing et des nippes à d’autres pauvres, et puis on y est : damned, on n’avait pas vu autant de socialistes, dont la queue devant l’Élysée-Montmartre tourne à l’angle de la rue, depuis, pfiou, on ne sait même plus.
« Off » de Jean-Louis Missika, Jean-François Martins et Ian Brossat avant le meeting d’Anne Hidalgo, le 26 février 2020
— Photos Sébastien Calvet/Les Jours.
Montons l’escalier encadré de militants qui distribuent totebags et drapeaux vert et blanc « Paris en commun » – c’est le nom des listes autour d’Anne Hidalgo regroupant outre les socialistes susnommés, des communistes, des écolos et même, denrée rare, des hamonistes de Génération·s. Tout le monde est gentil, porte de jolis vêtements et dit «pardon» pour passer. Voilà à l’étage la grande salle au beau parquet blond qui, souvenir des bières qui l’imbibent, colle sous la semelle. Sur l’écran derrière la scène qui va accueillir Anne Hidalgo, des petits films de présentation des candidats, leur livre préféré, la couleur de leur vélo et, oups, leur phrase préférée de Benjamin Griveaux, histoire de mettre un taquet à celui qui, jusqu’à la diffusion de ses propres petits films, était leur principal adversaire, mais bon on n’allait pas tout jeter à la poubelle, hein.
S’ils avaient eu le temps de retourner la séquence en substituant Agnès Buzyn à Griveaux, parions que leur phrase préférée de la néo-candidate LREM aurait été celle où elle accuse Anne Hidalgo de n’avoir pas préparé Paris à l’arrivée du coronavirus.