Ce n’est pas un plafond de verre qui règne sur l’industrie de la musique, c’est une calotte glaciaire. Épaisse, solide et surtout très ancienne. On l’a raconté dans cette série, le business du disque s’est construit, dès ses premiers pas au début du XXe siècle, comme un système d’exploitation des artistes et des « musiques noires » tout en ne confiant, à de très rares exceptions près, les postes à responsabilité qu’à des hommes blancs. « On parle d’une domination masculine de plus de cinquante ans, de mâles blancs qui dirigent tout alors qu’ils ne sont pas le reflet de la société, se désole ainsi Suzanne Combo, artiste et déléguée générale de la Guilde des artistes de la musique (GAM), principal syndicat des musiciens et musiciennes. Le sujet est le même dans la musique comme dans toute la société. » Mais le streaming est passé par là ces dernières années, qui a donné à toute une nouvelle génération d’artistes, et avant tout à la sphère rap (lire l’épisode 3, « Rap : les majors premières sur le racisme »), plus d’autonomie et plus de puissance face aux maisons de disques. Tout d’un coup, l’offensive est devenue possible et c’est cette situation pas du tout anodine qui a rencontré le mouvement étatsunien Black Lives Matter et ses déclinaisons dans le monde de la musique, The Show Must Be Paused et la Black Music Action Coalition, rassemblées pour briser enfin les vieux blocages de l’industrie.
En France, si le constat sur le racisme et les comportements de domination sont les mêmes qu’outre-Atlantique dans le petit monde de la musique, les artistes ou salariés noirs et racisés commencent à peine à s’organiser.