Contrairement à ce que son nom laisse à penser, le tournesol ne suit pas vraiment le soleil : c’est sa tige qui se courbe sous le poids de la fleur. Pour autant, la fleur jaune fait grise mine depuis la guerre en Ukraine (lire l’épisode 1, « L’huile déserte »), la France important du pays une partie de son huile de tournesol. Une dépendance oléicole largement relayée par les médias et qui expliquerait les razzias printanières dans les supermarchés et le surstockage pratiqué par les consommateurs. Pourtant, la sujétion de la France à la production ukrainienne serait, dans les faits, bien moindre.
« On veut nous faire croire que tout est de la faute de la guerre, mais la déstabilisation des marchés touche avant tout les industriels qui ont des accords commerciaux avec des fournisseurs étrangers, assure aux Jours Sylvain Plantureux, professeur d’agronomie à l’université de Lorraine. En réalité, la France exporte plus d’huile qu’elle n’en importe. » En effet, selon FranceAgriMer (Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer), sur les cinq dernières récoltes (2016-2021), la France aurait exporté en moyenne 411 000 tonnes d’huile de tournesol alors qu’elle n’en aurait importé « que » 294 000 tonnes.
Sauf que, dans le détail, depuis 2019, la tendance s’est inversée. La faute, selon l’interprofession des huiles et protéines végétales Terres Univia, à de mauvaises récoltes en 2019 et en 2020. « A contrario, en 2021, le besoin d’importer fut moindre, la récolte ayant été meilleure », précise l’organisation. Grande productrice de tournesol oléique, dont l’huile est très utilisée pour la friture (lire l’épisode 2, « La fin de la Françafrite ? »), la France a cependant besoin d’huile de tournesol classique (linoléique, celle pour la vinaigrette, en somme), qu’elle doit importer. Mais avec la guerre en Ukraine, la France doit se fournir ailleurs pour pallier le manque. Des bouteilles d’huile de tournesol provenant de Turquie ou d’Argentine ont ainsi peuplé les rayons ces dernières semaines, les deux pays faisant partie des plus gros producteurs d’huile de tournesol après l’Ukraine. Le groupe Avril, leader du secteur de l’huile en France, s’approvisionnerait quant à lui auprès d’autres pays européens tels que la Roumanie, la Bulgarie, la Hongrie ou encore l’Espagne.

Pourtant, depuis le conflit ukrainien, la France tente de réduire sa dépendance extérieure et de doper sa production nationale de graines et d’huile de tournesol.