Le 15 novembre 2016, l’intermédiaire libanais Ziad Takieddine, longtemps proche de Nicolas Sarkozy, faisait sensation en déclarant dans une interview à Mediapart avoir donné 5 millions d’euros en liquide à l’ancien Président de la part de Mouammar Kadhafi, le dictateur libyen tué en 2011. Deux jours plus tard, lors du dernier débat télévisé entre candidats à la primaire de la droite, David Pujadas s’était senti obligé de faire réagir l’ancien président de la République. La réponse de Sarkozy avait été furibarde : « Quelle indignité. Nous sommes sur le service public. Vous n’avez pas honte ? » Et d’ajouter : « Vous n’avez pas honte de donner écho à un homme qui a fait de la prison et qui a été condamné à d’innombrables reprises pour diffamation et qui est un menteur ? Ce n’est pas l’idée que je me fais du service public. C’est une honte. »
Depuis ce mardi matin, cette stratégie de défense – refuser de s’exprimer sur le fond et décrédibiliser ses accusateurs – est devenue légèrement plus compliquée. Nicolas Sarkozy est entendu par les policiers de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF, généralement prononcé « Oklif » pour simplifier) sous le régime de la garde à vue dans le cadre de l’affaire dite « des financements libyens » (à lire, ci-dessous, la mise à jour de cet épisode avec la mise en examen de Nicolas Sarkozy au terme de sa garde à vue). C’est la première fois que l’ancien Président doit s’expliquer sur ce sujet devant les enquêteurs depuis qu’une information judiciaire a été ouverte en avril 2013 et confiée à Serge Tournaire, le juge qui a déjà renvoyé l’ancien Président devant le tribunal dans l’affaire Bygmalion, ainsi qu’à ses collègues du pôle financier Aude Buresi et Clément Herbo. Cette garde à vue peut durer 48 heures. À son issue, Nicolas Sarkozy pourrait être présenté devant les magistrats et, si ses explications ne les convainquent pas, être mis en examen. Dans le même temps, l’ancien ministre Brice Hortefeux, l’un de ses proches, est interrogé, mais sous le régime de l’audition libre (a priori pour contourner sa protection liée à son statut d’eurodéputé qui aurait obligé les policiers à saisir le Parlement européen afin de demander la levée de son immunité).

Les enquêteurs disposent de nombreux éléments à charge contre l’ancien Président, accumulés depuis les premières révélations faites par Mediapart en 2011.