Corruption, trafic de drogue, blanchiment d’argent, recel, vol, violence volontaire, faux en écriture publique, détournement de fichier et violation du secret professionnel… La liste des charges, longue et inhabituelle, a de quoi faire pâlir n’importe quel gangster. À ceci près que le prévenu est un policier.
Ils sont huit à être jugés à partir de ce 3 février devant le tribunal correctionnel de Paris, dont six policiers, « Bylka » en tête. Cette histoire de ripoux hors norme, c’est l’affaire de la BAC du XVIIIe arrondissement de Paris, révélée par Les Jours (lire l’épisode 13 de Délits de flics, « Deux “baqueux” pris la main dans le sac »). En haut de l’affiche, « Bylka » (« Kabyle » en verlan) donc, le surnom de Karim M., qui dort en prison depuis la mi-juin, tout comme un autre « baqueux » du XVIIIe, Aaron B., à ses côtés dans le box, mais dont on ne sait pas encore grand-chose. Le tribunal devra, pendant les deux semaines d’audience, déterminer les responsabilités de chacun dans l’incroyable scénario de ce Ripoux 4.
Pour faire simple, la justice reproche à ces policiers d’avoir organisé un système de racket des dealers, voire de commerçants du quartier, d’avoir vendu des informations confidentielles et d’avoir mis en place un système de protection monnayée. Une fois payée, cette assurance évitait aux victimes de tomber. Les prévenus sont également soupçonnés d’avoir rédigé de faux procès-verbaux pour couvrir des interpellations non justifiées ou des vols commis lors de perquisitions. Enfin, Bylka est accusé d’avoir mis en place un système de blanchiment de l’argent extorqué. Toute une mécanique fonctionnant en vase clos, qui s’appuyait sur la capacité répressive de la police et la personnalité singulière de Karim M.

L’agent est entré dans la police en 2003. Depuis, il n’a jamais quitté le XVIIIe, son quartier d’affectation. Au fil du temps, il est devenu brigadier, a quitté l’uniforme pour patrouiller en civil en tant qu’agent de la BAC jour, un « baqueux ». Natif de l’Est parisien, il connaissait bien son quartier d’intervention. La rumeur lui attribue aussi une famille de commerçants bien implantée dans le quartier. L’homme mesure 1,70 m pour environ 90 kilos, cou plissé soutenant un crâne rasé : on n’a pas envie de plaisanter avec Bylka. Au moment de son interpellation, le 11 juin 2019, un collègue le décrit dans Le Parisien comme « un Robocop, connu pour ses méthodes musclées ». Son dossier professionnel le confirme.