A l’été 2009, la fine équipe d’Europe Écologie vient tout juste d’être élue au Parlement européen (lire l’épisode 2, « Jadot, l’hyperactiviste »). Ils sont quelques-uns à boire une bière en terrasse, place du Luxembourg, à Bruxelles. Une députée de la bande, issue de la société civile, arrive avec une pile de bouquins politiques. « J’ai décidé de clarifier si je suis de gauche ou de droite, je me donne deux mois », lance-t-elle aux autres. « Yannick, ça le faisait halluciner ! Parce qu’il est de gauche. À l’époque, lui, il était déjà structuré idéologiquement », se rappelle Damien Demailly, polytechnicien qui bossait au WWF et vient alors d’être recruté comme assistant parlementaire par Yannick Jadot. Le don d’ubiquité est désormais nécessaire pour suivre ce dernier, à la fois eurodéputé bizut et jeune intégré à l’écologie politique française.
Sur la première scène de théâtre, celle du Parlement européen, il est aussi perdu que les autres dans le dédale des couloirs. « En revanche, dès la première réunion de groupe, il est bluffant, il a un côté grande gueule. Les Allemands sont nombreux et installés, mais quand Yannick n’est pas d’accord, il n’attend pas la permission pour parler », précise Damien Demailly. Dans le bureau de Daniel Cohn-Bendit, alors président du groupe Les Verts/Alliance libre européenne, qui roule déjà sa bosse ici depuis quinze ans, on apprend les rouages et on regarde le foot. Et on bosse parce que les dossiers européens ne sont pas une sinécure. « C’est une bête de travail. Il a une capacité à ingérer de la connaissance que je n’ai jamais vue. Il lisait toutes les sources associées à mes notes et repérait même mes erreurs », évoque Sonia Rouabhi, aujourd’hui conseillère politique des élus écolos nantais, embauchée en 2013 comme assistante parlementaire après une bataille d’arguments sur les marchés carbone européens.
Yannick Jadot devient vice-président de la commission du commerce international. « Comme Jadot était le copain de Dany [Cohn-Bendit], ça lui donnait de la légitimité. Dany, il faisait vivre le Parlement, il avait compris qu’il fallait pousser des coups de gueule pour être repris. Yannick a beaucoup appris à ses côtés. Mais lui est plus écolo ! », commente Michèle Rivasi, qui fait partie de la fournée de quatorze élus de 2009. Ces leçons d’éloquence portent leurs fruits. En octobre 2016, à la veille du second tour d’une primaire écolo en France qu’il s’apprête à remporter, Yannick Jadot poste sur son compte Facebook