Les quelques badauds de ce parc parisien ont été un peu surpris lorsqu’Étienne s’est soudainement levé. « Il m’en manque sept, articule-t-il derrière ses lèvres retroussées. Heureusement que je bosse pas pour une marque de dentifrice. » Étienne a 61 ans dont dix-huit passés derrière les barreaux. Sa dentition accidentée est l’un des stigmates d’une longue détention. Car en prison, l’accès au soins relève du parcours du combattant, voire du traitement dégradant. « Un jour, je pars aux ateliers, j’avais la tronche en hamster, grince-t-il en se rasseyant. Le surveillant voit ma gueule et me dit de ne pas me pointer. Ça tombait bien, le dentiste devait venir ce jour-là ; en fait, il est venu deux mois plus tard. Il s’est excusé : “On a trop de boulot.” Moi je crachais du pus, l’abcès s’était crevé tout seul entre-temps. Ma dent était morte. Aujourd’hui encore, je perds des morceaux. »
Incarcéré à la prison de Mont-de-Marsan, dans les Landes, Maxime a, lui, développé un abcès qui a triplé de volume à la suite d’une rage de dents. Pendant de longues semaines, il attend alors de voir un dentiste. Finalement, raconte-t-il d’un ton égal,