Le 11 septembre, on avait assisté à la cour d’assises spéciale à un premier moment « Charlie » : toute la cour, magistrats, accusés, avocats et policiers confondus, avait été emportée dans un surréaliste éclat de rire général en regardant un dessin de Charb projeté à la demande de sa famille. Il y a eu un deuxième petit instant de la sorte, le 9 décembre, quand les deux avocats de l’accusé belge Michel Catino, 68 ans, ont commencé à plaider contre l’écrasante peine requise contre lui par l’accusation : quinze ans de réclusion avec une période de sûreté incompressible de dix ans. Or, Catino, petit délinquant connu pour des tripots clandestins, n’a pas vraiment les attributs extérieurs du jihadiste. Depuis qu’il a reçu un coup sur la tête en 1997, il a du mal à parler, il bredouille, un peu comme un enfant. Il est dégarni, un peu ventripotent. Il marche voûté, tenu en laisse et en menottes à la cour par deux policiers massifs. Estomaqués par le réquisitoire, ses avocats ont préféré le prendre un peu à la rigolade style « Charlie », au début de leurs plaidoiries, mercredi 9 décembre. « Lui, un terroriste ? Mais ça crève les yeux, c’est instinctif, il suffit de le regarder », a dit Me Béryl Brown. Fabian Lauvaux, son autre avocat belge, joignant le geste à la parole : « Je me retourne, je le regarde… Je ne vois pas ici de soldat du califat. »
Cependant, personne n’avait trop le cœur à rire, dans le fond.