Contrairement aux accusés du procès Méric, Lydia D. est restée ouvertement fidèle au milieu skinhead, « un mouvement culturel et musical » avant tout, dit-elle. L’ex-compagne d’Alexandre Eyraud, appelée à témoigner ce lundi matin, s’est présentée devant la cour d’assises avec une chemise violette aux manches retroussées, dévoilant une toile d’araignée sur le coude gauche, une fleur de lys et une phrase en allemand : « Mon cœur bat pour la oï » (un style de musique punk qui n’est pas l’apanage de l’extrême droite mais y est particulièrement apprécié). À 28 ans, elle a gardé sa coupe de « skin-girl » et travaille toujours dans la restauration, à Saint-Étienne. « Bonjour madame la directrice », commence-t-elle pour se montrer polie avec la présidente. Petits rires gênés dans la salle. Pendant une demi-journée, les anciennes compagnes de deux accusés ont tour à tour provoqué l’embarras, l’agacement et le désespoir.
Le 5 juin 2013, Lydia D. accompagnait Alexandre Eyraud et Samuel Dufour à la vente privée Fred Perry de la rue Caumartin, « une marque mythique dans notre milieu ». Comme eux, elle a entendu le militant antifasciste Steve D. les apostropher en ces termes, « d’un air sérieux et énervé » : « Faites pas trop d’achats, on va vous attendre à dix en bas, vous allez devoir courir. » Les skinheads, qui « ne voulaient pas de problèmes » selon la jeune femme, se sentent « inquiets ». Ils voient quatre personnes par la fenêtre et craignent que d’autres soient en chemin. D’une voix monotone, Lydia D. alterne bras croisés et mains dans les poches. Le temps que le vigile parte parler au groupe assis sur les marches de l’église, les skinheads restent dans le show-room, puis descendent dans la cour. C’est là qu’ils auraient croisé pour la première fois un Clément Méric « très déterminé », les interpellant à son tour : « Bon alors, vous venez ? On vous attend. »

Katia V., à l’époque en couple avec Esteban Morillo depuis huit mois, n’a pas assisté à ces premiers accrochages. À la barre, elle paraît extrêmement lasse, la voix empâtée, d’une lenteur à vous faire sortir les yeux des orbites. Aujourd’hui âgée de 37 ans, elle est secrétaire à Paris. En jupe et collants sombres, Katia V. porte d’épaisses lunettes et une petite queue de cheval au-dessus de sa nuque rasée. Elle se tord les mains en racontant et semble particulièrement mal à l’aise. Elle a été mise en examen pendant un an, au début de l’affaire.