On connaissait les « NEET », ces jeunes sans travail ni études ni formation, qui préoccupent régulièrement les gouvernements. Voici venus les « NER », les « ni en emploi ni à la retraite ». Eux aussi sont coincés dans des limbes, mais à l’autre bout de leur vie professionnelle : trop vieux pour le travail, ils ne le sont pas assez pour prétendre à une pension de retraite. Dans une étude de 2018, la Drees (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) estimait qu’1,4 million de personnes âgées de 53 à 69 ans en France, soit 11 % de la tranche d’âge, étaient prisonnières de ce sas de précarité. Elles vivent des allocations chômage, des minima sociaux ou d’une pension d’invalidité, sous le seuil de pauvreté pour près d’un tiers d’entre elles. Une très large majorité
L’histoire des retraites et celle de l’emploi des plus de 55 ans s’entremêlent. Les années 1970 marquent le début de l’âge d’or des « préretraites » publiques. En 1972 d’abord est créée la « garantie de ressources », qui permet aux licenciés économiques de plus de 60 ans de toucher une rémunération financée par l’assurance chômage. En 1977, son extension aux démissionnaires rencontre un vif succès, notamment auprès des cadres. Tout au long des années 1980, « la hausse du chômage concourt au développement des préretraites, retrace Ilias Naji, auteur d’une thèse en sociologie sur les retraites et post-doctorant à l’université autrichienne de Linz. Le gouvernement, mais aussi la CGT et la CFDT, partagent l’idée qu’abaisser l’âge d’inactivité permettra de réduire le chômage et de libérer des places pour les jeunes et les chômeurs ».
À l’époque, les préretraites contentent tout le monde.