Ce samedi matin de juillet, les tirs à l’arme lourde réveillent les habitants de l’immense complexo de Alemão qui regroupe plusieurs favelas du Nord de Rio. Trois heures plus tard, à 10 heures, une cinquantaine de manifestants se regroupent devant la base de l’Unité de police pacificatrice (UPP) de ce quartier. Habitante de toujours, Camilla, 31 ans, est venue avec sa fille protester contre les fusillades quasi-quotidiennes. Pour certains, c’est une chose normale, ils ont grandi dans cette ambiance. D’autres ont peur de se mettre en avant. Mais les gens meurent de balles perdues dans leur salon, alors même s’il n’y pas grand monde, on doit continuer à protester.
Lorsqu’elle termine sa phrase, le téléphérique qui passe au-dessus de nous cesse de fonctionner. Si le téléphérique s’arrête, c’est que c’est la guerre quelque part
, décrypte Camilla. À l’autre bout de la favela, des échanges de tirs ont lieu entre la police et des trafiquants. La manifestation continue mais, par prudence, le trajet a été écourté.
En début de cortège, le cercueil – dans lequel les militants ont mis des papiers avec les noms des tués depuis le début de l’année – attire l’attention des nombreux reporters présents et des habitants. Certains applaudissent, prennent une photo, se joignent quelques instants au petit groupe. C’est aussi ça le but. On sait que ce genre de manif n’attire pas grand monde. La population ne descend que quand elle est choquée, par exemple quand c’est un enfant qui est tué. Donc on fait un peu de théâtralisation pour que notre voix soit entendue malgré tout
, m’explique Thaina. Il espère que les gens vont partager les photos et les articles des médias sur Facebook. À l’approche des JO, il faut que les gens voient ce qu’est notre quotidien. Ce n’est qu’en maintenant la pression qu’on pourra faire bouger les choses.
En plus de son engagement à Vila Autódromo, favela sacrifiée pour les JO, Thaina est un militant actif du collectif Papo-Reto qui veut proposer une autre information sur les favelas. Il sait que les JO sont une opportunité pour se faire entendre dans le monde entier.

Après l’attentat de Nice, les autorités brésiliennes ont multiplié les déclarations rassurantes et ont largement médiatisé les exercices antiterroristes des forces de sécurité. Pendant les JO, le Brésil ne veut prendre aucun risque. 85 000 policiers et militaires sont déployés dans la ville pour éviter au maximum les incidents, mais aussi pour rassurer visiteurs et chefs d’État étrangers.