Quand il prend le TGV, Christian Lacroix voyage dans un monde qu’il a voulu coloré en vert fluo, prune, gris et rouge. Cette création est le résultat d’un déjeuner au Bristol lors duquel Guillaume Pepy, le président de la SNCF, lui lança : Je ferais bien rénover le TGV Atlantique. Si vous avez une idée…
Après un appel d’offres remporté contre Kenzo et une entreprise allemande, Lacroix est arrivé avec… une vertèbre animale et un œuf. Pour moi, il fallait que ce soit comme une main (la vertèbre) qui tenait ce qu’on a de plus cher (l’oeuf). Si vous regardez bien, on ne voit pas le pied du siège du TGV, je suis très fier de ça.
Le couturier semble avoir développé un tropisme pour les transports. Il a aussi créé le design du tramway de Montpellier. Enfin, dans les avions Air France, c’est son crayon qui habille depuis onze ans les pilotes, les hôtesses et les stewards. Parmi les costumes scrutés dans cette obsession, seuls manquent les gilets jaunes et les cols blancs. Avant lui, de grands noms de la couture avaient déjà posé leur signature sur l’habit bleu marine : Nina Ricci, Balenciaga, Hermès, Dior… Au cœur du concept d’uniforme chez Air France, on retrouve la figure de l’hôtesse de l’air et des mythes à la peau dure.

Comment avez-vous atterri dans le projet Air France ?
En faisant la gueule (rires). C’était presque le dernier jour du mois de juillet 2001. Le PDG de la maison de couture alors en poste me dit : Il y a un appel d’offres pour Air France. Si on pouvait y participer, ce serait génial.
C’était un moment particulier dans cette maison qui porte mon nom mais qui ne m’appartient plus. J’étais encore dans le groupe de Bernard Arnault et cela ne se passait pas aussi bien qu’on l’aurait souhaité. J’arrive donc à Roissy en traînant les pieds. Il y avait une présentation des nouveaux lounges (les salons privés pour les clients d’Air France, ndlr) que la compagnie était en train de préparer et du nouveau design de l’intérieur des avions. Il y avait aussi une femme pilote et un aréopage d’hôtesses, des filles qui parlaient très bien de leur métier. Et d’un coup, j’ai rarement ressenti ça, la réunion m’a capté, elle m’a passionné. C’est assez rare qu’un projet me fasse pousser des ailes, d’un coup comme ça.
J’ai commencé à dessiner le premier uniforme sur un sac à vomi de l’avion.
De quand date votre premier coup de crayon ?
À l’époque, je dessinais aussi les collections Pucci (Il demande à son assistant de sortir deux livres sur l’œuvre du styliste italien Emilio Pucci).