Le réquisitoire est tombé mercredi sur les coups de 15 heures, au terme d’une journée et demie d’audience : « Trois mois de prison avec sursis. » L’ancien magasinier d’Air France Vincent Martinez a écouté la voix du procureur Philippe Bourion sans broncher, à quelques mètres de lui, les coudes posés sur les genoux. La salle du tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) était tellement pleine à craquer depuis l’ouverture du procès mardi matin, qu’il a fallu le renfort de chaises pliantes pour asseoir les quinze prévenus, tous salariés ou anciens salariés d’Air France. Certains d’entre eux se sont presque retrouvés épaule contre épaule avec Xavier Broseta, ex-DRH d’Air France, et Pierre Plissonnier, directeur de l’activité long courrier, les deux « chemises arrachées » lors de la manifestation du 5 octobre 2015 au siège d’Air France (lire l’épisode 7, « Du jour de la chemise au jour du procès »). Rejouant, cette fois-ci devant un tribunal correctionnel, cette guerre qui oppose à Air France gilets jaunes et cols blancs.

À la sortie du palais de justice, Vincent Martinez, licencié le 31 août, grillait une clope au soleil, l’air étonnamment rassuré. « Dans un dossier politique comme celui-là, on pouvait s’attendre à pire que trois mois de sursis. » Sa plus grande crainte : « De la prison ferme, comme dans le cas de Goodyear. » Le jugement sera rendu le 30 novembre. « On verra bien si le tribunal suit le procureur. » Ce dernier a requis 1 000 euros d’amende contre les onze salariés qui ont forcé le portail d’accès au siège d’Air France, pour laisser passer les manifestants parvenus ensuite jusqu’au comité central d’entreprise (CCE) (lire l’épisode 1, « Le jour de la chemise »). Et deux à quatre mois de prison avec sursis contre les cinq jugés pour « violences en réunion » envers des cadres et des agents de sécurité. C’est le cas de Vincent Martinez. Il a reconnu avoir poussé un « vigile » en pleine course. Lequel est tombé, entraînant dans sa chute Xavier Broseta, en cours d’exfiltration.
Quelques jours avant l’audience, Vincent Martinez disait vouloir convaincre le tribunal qu’il n’était pas un « voyou », selon le terme employé dès le lendemain des faits par Manuel Valls. Terme repris aussi par certains médias (lire l’épisode 12, « “Je dois faire comprendre que je ne suis pas un voyou” »). Il estime avoir pu défendre son cas. «