À Longyearbyen (Norvège)
Il y a quelque chose d’angoissant à se faire avaler par la mine. 400 mètres de roche et de charbon glacé vous écrasent et vous encerclent, sans que vous puissiez vous tenir debout. Il y a quelque chose de douloureux à se tenir avec eux, à genoux, dans le noir des lanternes. Eux qui respirent cette poussière obscure s’incrustant dans les rides, jusque dans la commissure de leurs regards bleus. Comment font-ils, eux qui, chaque jour, tirent leurs solides carcasses au fond de cette fosse givrée ? Eux, les maîtres de ce paradis sans lumière. Eux, les derniers mineurs du Svalbard.
Cela fait près d’un an qu’Axelle de Russé essaye de nous faire entrer dans la mine numéro 7. Même son directeur est devenu admiratif de la ténacité de la photographe. Per Nilssen n’a rien contre nous, mais le sujet est sensible dans l’archipel norvégien et nourrit régulièrement la polémique entre les « pro-mine », qui veulent conserver l’activité et les emplois, et les « pro-écologie », qui défendent la fermeture de cette verrue environnementale. Le patron veut donc être certain que nos chroniques du changement climatique au Svalbard – dont la capitale, Longyearbyen, est le village qui se réchauffe le plus vite sur Terre – ne viendront pas mettre de l’huile sur le feu. Il finit pourtant par céder, à l’hiver 2018.
Nous voici donc ce 12 décembre, à un quart d’heure en voiture au sud-est de la ville, devant la dernière mine de Longyearbyen, dans l’Arctique.