Deux mois déjà que l’offensive militaire russe a commencé en Ukraine et en dépit des certitudes d’avant-conflit, l’armée ukrainienne continue d’opposer aux forces de Vladimir Poutine une résistance acharnée. Et Joe Biden, président des États-Unis, ne cesse de célébrer cette résistance qu’il encourage et nourrit. Le 21 avril à la Maison-Blanche, annonçant une nouvelle tranche de 800 millions de dollars d’assistance militaire aux Ukrainiens, Joe Biden s’est dit«ébloui» de la résistance des militaires et des civils face à l’agression de Poutine. Avant de rappeler que cette résilience n’était possible que par l’aide apportée par les États-Unis. L’argument n’est pas sans fondement. Les chiffres cumulés depuis un mois sont vertigineux : la présidence Biden a livré au moins 4 milliards de dollars d’armement à l’Ukraine depuis l’investiture de janvier 2021, dont 3,3 milliards après le début de la guerre, le 24 février. À titre de comparaison, les États-Unis ont dépensé environ 3,8 milliards de dollars d’aide militaire en Afghanistan pour les deux années 2019-2020.
Cet afflux s’est doublé depuis deux mois – et notre première analyse de la position de Joe Biden (lire l’épisode 15, « Biden, président de la première impuissance mondiale ? ») – d’une montée en puissance des armements fournis par les États-Unis à l’Ukraine. Certes, les avions de chasse, qui permettraient aux Ukrainiens de contester encore davantage l’espace aérien à l’armée russe, restent, en dépit de bien des hésitations, un tabou infranchissable pour la présidence Biden. Début mars, après avoir encouragé la Pologne à mettre à disposition de l’Ukraine ses MiG-29 de fabrication soviétique, l’administration Biden a fini par reculer pour ne pas entrer en conflit direct avec la Russie. Et mi-avril, le Pentagone a été obligé de rectifier une incompréhension en précisant qu’il ne livrait aucun avion en entier à l’Ukraine mais seulement des pièces détachées. Durant cette même période, les États-Unis ont par contre commencé à livrer des drones de combat Switchblade, des hélicoptères Mil Mi-177 rapatriés d’Afghanistan ainsi que des pièces d’artillerie howitzer à l’armée ukrainienne. Et ils ont aussi entrepris de former les soldats ukrainiens au maniement de ces systèmes d’armement complexes. Le partage du renseignement opérationnel, que la patronne de l’espionnage américain, April Haines, avait choisi de ralentir en début de conflit, est désormais en temps réel entre les États-Unis et l’armée ukrainienne.
Barack Obama, alors président des États-Unis, et son vice-président Joe Biden, le 21 octobre 2015 à la Maison-Blanche, à Washington
— Photo Mike Theiler/Pool/Abaca.
En dépit de cette intensification de l’aide militaire, le président Biden a réitéré sur tous les tons depuis deux mois que jamais il n’enverrait des troupes combattre en Ukraine à cause du risque d’escalade nucléaire face à la Russie.