La canicule commence à peine. Aux urgences de l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis, la nuit du 23 au 24 juillet est chaude, mais la clim est fraîche. Elle ne tombera en panne que le lendemain. Le soleil décline puis disparaît sous le porche, où quelques silhouettes de fumeurs se découpent dans la pénombre. À mesure que les ténèbres progressent, ces formes deviennent plus inquiétantes qu’amicales. On ne voit qu’au dernier moment à qui on a affaire : aide-soignant en pause, ambulanciers de passage, patients anxieux, sans-abri cabossés, familles roms venues chercher l’asile dans une enceinte hospitalière. À l’intérieur, il y a peu de fenêtres et la lumière reste la même. L’équipe paramédicale de jour passe au vestiaire et quitte les lieux. À partir de 21 heures, les infirmiers, aide-soignants et brancardiers de nuit leur succèdent (lire l’épisode 1, « “Les Jours” se réveillent aux urgences »).
Rachid prend un café avant de s’y mettre. Comme ses collègues Malika, Dorlanne, Zeineb et Nkwami, l’infirmier va travailler jusqu’à 7 heures du matin, un shift plus long que celui de la journée (dix heures de suite contre sept heures trente). L’emploi du temps de ces noctambules alterne entre les « grandes semaines » (lundi, mardi, vendredi, samedi, dimanche) et les « petites semaines » (mercredi et jeudi). « On aime travailler aux urgences », reconnaît Rachid, embauché à Delafontaine juste avant la canicule de 2003. Il a choisi la nuit, ses imprévus et ses