Are you ready for « Les Dessous des “Jours” », folks ? À cinq semaines de l’élection présidentielle américaine, la newsletter mensuelle des coulisses des Jours s’entretient avec Corentin Sellin, spécialiste des États-Unis et chroniqueur pour votre site préféré depuis quatre ans et demi.
Le 15 février 2020, tu débutais « This is America » sur « Les Jours » avec une présidentielle qui allait peut-être voir Donald Trump réélu à la tête des États-Unis. Qu’est-ce que ça fait de débuter aujourd’hui la quatrième saison de cette série avec une nouvelle élection… qui rappelle la précédente ?
Cette élection n’est évidemment pas la même, mais elle a un goût de déjà-vu : l’omniprésence de Donald Trump et son refus persistant de reconnaître sa défaite en 2020 donnent l’impression de vivre une histoire qui ne finit jamais. Et je crois que depuis quatre ans, nous avons réussi à transmettre cette sensation de continuité aux abonné·es. Pas sûr que Trump ait fait tout ça exprès pour Les Jours, mais c’est vrai que notre concept de séries et de saisons a pris toute sa dimension !
Je vis cette quatrième saison comme le dernier chapitre de cette histoire sans fin. D’autant plus que Trump a déclaré qu’il ne se représenterait pas s’il perdait cette fois-ci. On arrive peut-être enfin à la conclusion de cette saga, ou du moins à un tournant plus décisif.
En quatre ans, tu as écrit 94 chroniques pour « Les Jours ». Comment cela t’a-t-il influencé ?
Ce que j’aime aux Jours, c’est que je peux ancrer mes analyses dans la recherche et les sciences humaines. Bien sûr, ce n’est pas un travail scientifique au sens académique du terme, mais c’est de la vulgarisation sérieuse, sourcée, documentée, et les abonné·es peuvent vérifier les chiffres, les références qu’on ajoute à chaque épisode pour enrichir la lecture. J’ai fait le choix, il y a quatre ans, de tenir une chronique régulière plutôt que d’écrire un livre… et 94 chroniques, c’est finalement l’équivalent de plusieurs livres !
N’est-ce pas difficile d’articuler l’immédiateté de l’information avec la profondeur des sciences humaines ?
C’est justement la force de notre chronique aux Jours. Contrairement à d’autres médias, où l’on est souvent soumis à l’actualité immédiate, ici nous avons le luxe du temps et de la réflexion. Ce que je trouve extrêmement précieux, c’est qu’on ne réagit pas à chaud. Avec Raphaël Garrigos, le directeur de la rédaction, on choisit soigneusement les sujets en fonction de leur importance sur le long terme. Est-ce que cet événement sera encore pertinent dans cinq, dix ans ? Est-ce qu’il dit quelque chose de fondamental sur l’évolution des États-Unis ? C’est ce travail de hiérarchisation qui permet de prendre de la hauteur sur le flux continu d’informations.
Prenons l’exemple de l’insurrection du Capitole en janvier 2021. Dès que c’est arrivé, il était clair que cet événement marquerait un tournant historique. Mais ce n’est pas le cas de toutes les actualités. Certaines semblent importantes sur le moment, mais avec un peu de recul, elles s’avèrent anecdotiques. Ou bien certains événements, même si dramatiques, ne permettent pas vraiment de saisir l’essence d’une époque
Cette année, tu n’animes pas « This is America » seul : Mehdi Bouzouina est sur place pour compléter tes analyses. Comment tes réflexions s’articulent-elles avec le travail sur le terrain ?
Lui peut couvrir l’actualité au jour le jour, rencontrer des électeurs, tandis que moi, je prends plus de recul, j’analyse à partir de données historiques, politiques et quantitatives. Je n’ai pas le don d’ubiquité, et pour une élection d’une telle importance, être sur place est capital.
Comment fais-tu pour maintenir cet équilibre entre la rigueur historique et la chronique journalistique ?
C’est un des défis majeurs de ce type de chronique. En tant que professeur, j’ai l’habitude de développer mes idées longuement, alors j’ai dû apprendre à me restreindre car dans une chronique, il faut être concis, percutant, garder un rythme tout en étant clair et précis. Dans l’équipe, il y a une private joke sur les titres que je propose… parfois plus adaptés à un cours magistral qu’à un média ! Même si j’ai l’impression de m’être amélioré depuis quatre ans, c’est grâce à Lucile Sourdès-Cadiou et François Meurisse, éditeur·ices des Jours, que chaque épisode a un titre qui claque. Merci à eux !
Il y a peu, ton travail a été cité par le « New York Times » après la seconde tentative d’attentat contre Donald Trump. C’est une consécration ?
Pas une consécration, mais c’est un moment très émouvant. Le New York Times, c’est une référence absolue pour quiconque s’intéresse à l’actualité internationale. Pour quelqu’un comme moi, venu à l’Amérique par la culture populaire et devenu un simple vulgarisateur, être cité dans un journal aussi prestigieux, c’est une belle reconnaissance de la qualité du travail qu’on fait ici, aux Jours.
Dans une campagne présidentielle ultra-mouvementée, prendre de la hauteur est essentiel : pour soutenir le travail de Corentin Sellin et des Jours, abonnez-vous ou faites-nous un don !
Et sinon ? Les Jours ont démarré l’année scolaire avec de nouvelles séries : RN, la dernière marche, pour suivre la conquête