Petite introduction en bourse pour ceux qui s’emmêlent dans ses cordons

Corentin : dis Lucie, j’ai appris un truc dingue. Tu savais que Kylie Jenner et Rihanna avaient fait perdre des millions de dollars à Snapchat ? Elles ont ruiné l’entreprise rien qu’en les critiquant !
Lucie : Bah alors mon petit Corentin, qu’est-ce que c’est que ces sornettes ?
C : je te jure ! Snapchat s’est cassé la figure à la Bourse !
L : A la Bourse, tu dis ? Eh bien, Coco, figure toi que c’est un peu plus compliqué que ça. Bouge pas, je vais tout expliquer. Aujourd’hui, on va parler de la Bourse et de son fonctionnement !
[GENERIQUE C’EST PAS SORCIER]
Bienvenue dans cet épisode de C’est Pas S… des Croissants consacré à la Bourse ! J’ai voulu vous expliquer son fonctionnement à cause de deux actualité. Récemment, Kylie Jenner et Rihanna ont toutes les deux critiqué Snapchat, l’application de photos et de vidéos éphémères. La première regrettait la nouvelle version du service. L’autre a critiqué, à juste titre, le fait que Snapchat ait diffusé une publicité choquante, qui se moquait des violences conjugales dont elle a fait l’objet. Très vite, les médias ont commencé à dire que les deux stars avaient fait perdre “des milliards de dollars” à Snapchat … Sauf que ce n’est pas tout à fait vrai.
Déjà, un petit point de définition. Une bourse est une institution qui permet de découvrir et d’afficher le prix d’actifs et d’en faciliter les échanges dans des conditions de sécurité satisfaisante pour l’acheteur et le vendeur. La présence d’une Bourse est permanente, contrairement à celle d’un marché. Les premières bourses de l’histoire étaient agricoles : on y organisait la vente de matières premières, comme du blé. C’était aussi un moyen commode pour les marchands d’écouler des marchandises venues du monde entier. Par exemple, on considère que le premier krach boursier de l’histoire a eu lieu en Hollande, au XVIIe siècle : le cours des bulbes de tulipes s’est à l’époque effondré.
C : OK mais aujourd’hui on ne vend pas de fleurs à la Bourse, si ?
L : Eh bien figure toi qu’il existe toujours une Bourse aux fleurs en Hollande ! Mais généralement, quand on parle de la Bourse, avec un grand “la”, on parle plutôt des grandes bourses mondiales. Vous avez peut être déjà entendu leurs noms : le New York Stock Exchange, le Nasdaq, Euronext … Ce sont elles mêmes des entreprises privées, dont le rôle est d’organiser l’échange d’actifs financiers, c’est-à-dire une entité avec une valeur économique. Par exemple, une action, c’est un actif. Vous avez peut être en tête les images classiques des traders qui hurlent en agitant des papiers, pour vendre ou acheter des actions. Ce n’est plus vraiment d’actualité. Aujourd’hui, les échanges se font surtout via des logiciels, qui peuvent acheter et vendre de manière automatique.
Les Bourses remplissent plusieurs rôles. Le plus connu, c’est celui du financement des entreprises. Quand une société grossit, elle peut choisir de s’introduire en Bourse. De cette manière, elle permet à de nombreuses personnes d’investir chez elle et d’augmenter son capital, c’est à dire l’argent qu’elle a à disposition. Ces personnes deviennent des actionnaires. Il peut s’agir de particuliers, comme vous et moi. Ils misent généralement de l’argent via leur banque, qui leur constitue un portefeuille d’entreprises intéressantes. Par exemple, si vous avez souscrit à une assurance vie, votre argent est sans doute en Bourse. Mais les actionnaires peuvent aussi être d’autres entreprises, des fonds d’investissement, bref, des grosses entités. Plus on possède de capital d’une entreprise, plus on a son mot à dire sur sa stratégie. Régulièrement, les actionnaires recoivent des dividendes, c’est à dire une partie du bénéfice réalisé par l’entreprise.
Les entreprises peuvent se financer via le marché primaire : c’est là qu’on emet des nouvelles actions. L’entreprise décide d’un prix d’introduction. Si les investisseurs sont intéressés, ce prix peut augmenter. Sinon, il baisse. C’est en émettant ces titres qu’une entreprise empoche de l’argent, qui va ensuite lui servir à financer ses activités. Ensuite, les actions déjà émises sont échangées entre investisseurs sur le marché secondaire. On peut revendre son action pour se faire de l’argent, par exemple si le prix de vente est plus élevé que celui à l’époque où vous avez acheté le titre.
C : donc c’est quelque chose d’assez risqué ?
L : Oui ! Car il est aussi possible qu’un actionnaire doive revendre une action alors que son prix a baissé par rapport au moment où il l’a acheté. Le prix d’une action varie tous les jours, selon la demande et l’offre sur le marché secondaire. C’est quelque chose de très instable ! Un cours peut varier selon l’actualité d’une entreprise, ses résultats financiers, ou même ceux d’une société rivale. Par exemple, quand le titre de Facebook baisse, souvent celui de Twitter baisse aussi.
[Son Loup de Wall Street]
A noter qu’il faut distinguer les actions des obligations. Ce type d’actif est une créance : l’entreprise, ou l’Etat, qui émet des obligations fait en fait un emprunt. Comme vous quand vous faites un emprunt à la banque. Et comme une banque, vous percevez des intérêts et, finalement, le remboursement de l’argent que vous avez prêté à l’entreprise ou l’Etat. Sauf en cas de faillite, ce qui est un scénario rare.
C : d’accord mais je comprends toujours pas pourquoi Kylie Jenner et Rihanna n’ont pas fait perdre des milliards à Snapchat …
L : J’y viens ! Mon explication est rapide mais vous l’aurez compris : le cours de Bourse d’une entreprise est instable. Il est aussi théorique. Quand le titre de Snap, l’entreprise qui édite Snapchat, chute, ça ne veut pas dire qu’elle perd de l’argent. Cela veut dire qu’il y a plus d’investisseurs qui vendent ses actions sur le marché secondaire, que d’investisseurs qui n’en achètent. Ce sont des titres déjà émis par Snap. L’entreprise a déjà, concrètement, à sa disposition l’argent des investisseurs. Donc quand Kylie Jenner ou Rihanna font tanguer son cours en Bourse, Snap n’en souffre pas vraiment. En tous cas, pas tout de suite. Par contre, sur le long-terme, ça peut être un problème : si le titre d’une entreprise est boudé sur les marchés, elle pourra difficilement lever de nouveaux des fonds au travers de l’émission d’actions. Par ailleurs, dans le cas où elle chercherait à racheter ses actions ou carrément de se retirer de la côte, c’est à dire de redevenir une entreprise privée absente des marchés, ça peut poser problème. Car un prix moins important, ça veut dire qu’on a perdu, au final, de l’argent.
C : Bon eh bien il ne reste plus qu’à attendre que Rihanna redise un mot sympa sur Snapchat pour voir si ça marche dans les deux sens. Merci Lucie pour cette explication claire, et à bientôt !