Il était une fois le « Grande America »
Fin du monde. Chaque midi, « Les Jours » vous offrent une mauvaise nouvelle. Aujourd’hui, les dangers de la soute.
Le cargo porte-conteneurs-roulier italien Grande America, ses 213 mètres de long, l’incendie à son bord le 10 mars, son naufrage deux jours plus tard, à 330 km au large de La Rochelle…
Une histoire incroyable et banale, une histoire qui en contient cent
Une histoire qui parle pétrole et pollution – qui ne devrait, a priori, pas arriver sur les côtes françaises avant plusieurs jours
Une histoire qui parle biodiversité et contamination – un fou de Bassan a été découvert mort la semaine passée à Hendaye (Pyrénées-Atlantiques), souillé par les hydrocarbures du navire
Mais intéressons-nous plutôt à ce que l’association Robin des Bois a appelé, le 21 mars, « une première dans l’histoire de l’accidentologie maritime mondiale »
Ce jour-là, la préfecture maritime de l’Atlantique a transmis, alors que l’information reste ordinairement confidentielle, le détail du chargement du navire naufragé
Un inventaire vertigineux
D’abord, 45 des 365 conteneurs contenaient des matières dangereuses : hydrogénosulfure de sodium, substitut de térébenthine, phosphate de zinc, aérosols, acide chlorhydrique, acide sulfurique, etc.
Si le ministre François de Rugy a assuré qu’il n’y aurait pas de « pollution chimique », car « la plupart des produits qui étaient dans les conteneurs ont brûlé », ce n’est pas l’avis de Lamya Essemlali, présidente de l’ONG Sea Shepherd France
Parmi les marchandises non dangereuses, on pourrait trouver croustillant ces conteneurs remplis de chips…
…mais quand on doit en remorquer plus de 30 tonnes, la patate est moins douce
Et puis, il y a le cas épineux des véhicules, classés à part par la préfecture maritime : pas moins de 2 100 ont sombré par plus de 4 000 mètres de fond
Parmi eux, 1 212 voitures neuves, dont des Porsche à destination du Brésil (le cargo faisait la route Hambourg-Casablanca, mais ce n’était pas la fin du voyage)
Les 567 voitures d’occasion posent enfin une dernière question, ainsi que le notait un article de L’Humanité du 15 mars (malgré une erreur sur le nombre de véhicules concernés) : avaient-elles été retirées du marché en Europe pour être revendues en Afrique ?
Autrement dit : « À quoi sert la prime à la casse (censée réduire les émissions de gaz à effet de serre, ndlr) si les vieilles voitures vont en Afrique ? »
Un phénomène bien réel, bien documenté par Le Monde en décembre 2017, qui signalait ainsi qu’au Kenya « 99 % des voitures importées sont d’occasion »
Le Grande America, une histoire de mondialisation… du commerce comme de la pollution
À demain (si on tient jusque-là).