Cette semaine, auditionnée à l’Assemblée nationale en commission des affaires économiques sur la situation du groupe, la direction de SFR a tenu à rassurer les députés. La stratégie de Patrick Drahi est « rationnelle », « Altice est un groupe très solide », a martelé Alain Weill. Le tout nouveau PDG de SFR lisait une feuille. Visiblement, ce n’était pas le rapport qui venait de lui être remis, et que se sont procuré Les Jours.
Car c’est cette semaine également qu’en comité central d’entreprise (CCE), devait être examiné un épais rapport du cabinet d’expertise Sextant sur la situation économique et sociale de SFR. Commandé par le CCE, ce document fait de la situation une analyse sensiblement différente – doux euphémisme – de la version présentée par le PDG aux députés. La synthèse de l’expert-comptable commence par cette phrase : « Trois ans après la reprise de SFR par Altice [c’est-à-dire le rachat par Patrick Drahi, ndlr], force est de constater que la stratégie mise en œuvre ne fonctionne toujours pas. » La suite des conclusions est à l’avenant.
Depuis son rachat par Patrick Drahi, SFR a privilégié une stratégie d’enrichissement de l’offre clients en leur vendant des « contenus » accessibles depuis leur mobile ou leur box : de la presse, du foot, des chaînes de télé, de la vidéo… En échange, l’opérateur pensait pouvoir augmenter tranquillement le prix des abonnements ou refiler, l’air de rien, des options « contenus » à ses clients. Il semblerait que les intéressés aient modérément apprécié. Puisqu’ils sont partis, et en masse : 1,5 million d’abonnés en moins en trois ans. Bilan, résumé par le cabinet d’audit : « Une stratégie de contenus qui est pour l’instant loin de porter ses fruits. Force est de constater que les hausses tarifaires opérées se sont systématiquement traduites par une progression du churn. » Et, au cas où la phrase ne serait pas claire, des petits graphiques colorés résument le propos avec le montant trimestriel de l’Arpu et le taux des abonnés en partance : le parallélisme des formes est parfait. Visiblement, les clients n’aiment pas payer plus cher. C’est ce que l’expert-comptable nomme « la persistance d’une forte sensibilité des clients aux prix ».

L’autre volet de la stratégie Drahi depuis qu’il a racheté SFR, c’était de réduire les coûts. Et par exemple au service clients, qui s’est retrouvé compressé par des suppressions de moyens et de postes, pour finir complètement externalisé. Or, là aussi, le rapport d’expertise est sévère.